« La science est une chose trop importante pour être laissée entre les mains des seuls savants. » (Carl E. Sagan)

Laurent Toubiana : «L’épidémie de Covid-19 a engendré un monstre»

Laurent Toubiana : «L’épidémie de Covid-19 a engendré un monstre»

Épidémiologiste et docteur en physique, Laurent Toubiana est chercheur à l’Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (Inserm), où il dirige une équipe de recherche au sein du Laboratoire d’Informatique Médicale et d’Ingénierie des Connaissances. Il est par ailleurs le fondateur et le directeur de l’Institut de Recherche pour la Valorisation des Données de Santé, qui propose d’analyser les données médicales relatives aux épidémies. Pour lui, l’épidémie de Covid-19 est loin d’avoir été la plus grave dans l’histoire des sociétés modernes occidentales. Trois questions à un scientifique critique.

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Sciences Critiques – Vous êtes qualifié, catalogué, de « rassuriste ». En quoi la crise sanitaire n’est-elle pas aussi grave que le prétend le discours médiatique dominant, selon vous ?

J’ai été qualifié de « rassuriste » simplement parce que je disais des choses décalées par rapport à la version officielle qui, pour moi, est monstrueuse, et ce pratiquement depuis le début. Cela a été un moyen de disqualifier des gens avec un mot en « iste », sans pour autant prendre trop de risque en disant « c’est un complotiste », le mot consacré[1]NDLR : Lire notre « Trois questions à… » Richard-Emmanuel Eastes : « Le complotisme est le symptôme des dérèglements du monde », 25 novembre 2022.. Il n’y avait rien de complotiste dans ce que je disais, car c’était simplement les faits tels que je les voyais.

Début mars 2020, avant que l’on ne commence à voir les premiers vrais cas en France, j’ai écrit un texte. Ce premier papier, je l’ai écrit presque plus pour moi. Je me disais « il ne faut pas y aller car je sais ce qui va se passer ». Mais c’était plus fort que moi, il fallait que je dise ce que je voyais. Pour n’importe quelle crise sanitaire, il y a toujours le même scénario qui se déroule : cela se termine mal pour ceux qui interviennent et essaient de moduler l’ardeur des alarmistes. C’est toujours un drame. Ceux qui essaient de moduler sont toujours méprisés, c’est systématique. En m’engageant, je savais à quoi je m’exposais. Et je l’ai dit dès le début.

 

Toutes les manipulations possibles à faire sur un évènement ou sur un sujet étaient là, devant nous exposées.

 

Maintenant, concernant les faits, j’avais l’habitude des épidémies de maladies transmissibles et nous avions les chiffres. D’autre part, nous avons eu l’expérience du Diamond Princess, le fameux bateau. Et une autre expérience, différente, avec le porte-avion Charles-de-Gaulle. Le Diamond Princess donnait un certain nombre de paramètres de la dynamique de l’épidémie, et ce qui allait se passer sur des indicateurs essentiels, à savoir le nombre de malades, de morts et qui étaient les personnes touchées.

Je disais simplement, en me basant sur le nombre de malades, que cette épidémie n’a aucune commune mesure avec ce qui en est fait. J’ai commencé à être taxé de « rassuriste » de manière concomitante avec la massification des tests PCR, à partir de juillet 2020. C’était insupportable de voir la mise en place du masque dans la rue, après le coup mortel du confinement généralisé de la population.

 

 

 

L’épidémie de Covid-19[2]NDLR : Voir notre dossier spécial « Covid-19 ». n’était pas sans malades, n’était pas sans morts, mais les mesures et le discours public étaient totalement en décalage. C’est plus qu’une disproportion, c’est derrière ça une forme de manipulation d’à peu près tout : concepts, chiffres. Tout était mélangé. Une profusion invraisemblable. Toutes les manipulations possibles à faire sur un évènement ou sur un sujet étaient là, devant nous exposées.

On nous a dit un peu plus tard que les chiffres ne mentaient pas. Mais les chiffres peuvent mentir : en eux-mêmes ils ne disent rien, mais il suffit de les présenter d’une certaine manière et de ne pas donner les bonnes explications. Un chiffre, n’importe lequel, est totalement différent s’il est répété une fois par semaine ou une fois par jour. Autrement dit, la répétition, le simple fait de marteler, de redire les mêmes chiffres, c’est déjà une monstrueuse manipulation.

Un chiffre donné sans référence, sans dénominateur, ne veut rien dire. C’est la base de l’épidémiologie : le dénominateur est plus important que le chiffre lui-même. Tous les jours, un Directeur général de la Santé arrivait et nous disait n’importe quoi. Cette forme d’incompétence est inadmissible. Pour moi, qu’un expert officiel ne puisse pas présenter la dynamique d’une épidémie avec les méthodes habituellement utilisées, c’est déjà le premier niveau de discrédit.

 

Justement, que pensez-vous du travail des autorités sanitaires, et particulièrement de Santé Publique France ?

Avant de parler du travail de cette autorité, il faut expliquer ce qu’est Santé Publique France. C’est un organisme qui ne fait pas de recherche mais qui est là pour mettre en place les moyens de la santé publique, les moyens en termes de connaissances sur la santé d’une population. Santé Publique France est issue de trois organismes. Je vais parler de celui que je connais le mieux : l’Institut national de veille sanitaire (InVS). Avant Santé Publique France, qui a été officiellement créée en 2016, il y avait donc l’InVS, qui mettait en place des systèmes de veille, en lien avec les agences régionales de santé, pour récupérer des informations sur la santé publique.

Avant l’InVS, dans les années 1990, il y avait le Réseau national de santé publique (RNSP). Quand je l’ai connu, c’était tout petit. A l’époque, il y avait une expérience fantastique, qui s’appelait le « réseau Sentinelles », créé en 1984 au sein d’une unité de recherche de l’Inserm [Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale, NDLR], l’U263, unité de biomathématique, dirigée par Alain-Jacques Valleron. C’est une unité que j’ai rejoint en 1992. Sentinelles était une vraie innovation qui profitait de l’installation du Minitel, répandu sur toute la France. Nous en avions profité pour diffuser de l’information vers le grand public, il y avait même des cartes de diffusion des épidémies. Et, en même temps, nous étions capables de recueillir de l’information venant d’un vaste territoire. Le réseau électronique, c’était le Minitel et le réseau formel, c’était les médecins qui, toutes les semaines, donnaient l’ensemble des cas observés au cours de leur activité pour certaines pathologies, huit initialement. Derrière, il y a bien sûr de la méthodologie, une estimation quotidienne ramenée à la semaine courante, avec toute une série de redressements.

 

La répétition, le simple fait de marteler, de redire les mêmes chiffres, c’est déjà une monstrueuse manipulation.

 

Je suis resté 12 ans dans cette unité de l’Inserm, puis j’ai rejoint une autre unité et notamment travaillé sur les maladies hivernales touchant les enfants. C’était une énorme expérience, qui m’a permis de toucher tous les médecins de France. En l’espace de deux saisons, j’avais une base de données dix fois plus importante – avec les médecins généralistes, les pédiatres, les pneumologues – que tout ce qu’avait fait le réseau Sentinelles depuis sa naissance. À cette occasion, j’ai rencontré des gens d’une grande fédération de médecins en première ligne. Cela s’est très bien passé et à leur Assemblée générale à Cherbourg en 2014, je suis intervenu en disant : « Nous serons le Gold Standard de l’épidémiologie des maladies transmissibles en France.» Avec ces données, nous devenions en effet le réseau le plus précis, le plus précoce.

 

 

En 2014, j’avais les premiers résultats. Et l’année suivante, c’était le scandale. Nous avons déclaré la grippe trois semaines avant le réseau Sentinelles, qui ne l’avait même pas détectée. Cela a été un scandale absolu. L’InVS, Santé Publique France à l’époque donc, m’a dit : « Il faut vous taire, vous n’avez pas le droit de dire ça ! ». Ils ont influencé jusqu’à la direction des universités, jusqu’à la direction de l’Inserm. J’ai dû m’arrêter et cesser d’intervenir dans les médias. Mais mon système continuait à fonctionner. Cette fédération de médecins a continué à communiquer mais mon nom n’apparaissait plus.

 

Il faut vous taire, vous n’avez pas le droit de dire ça !

 

Pendant cette période, nous étions toujours en avance sur le réseau Sentinelles pour la détection de l’épidémie, l’arrivée de son pic et sa quantification globale. C’était très grave car cette année-là, le réseau Sentinelles et Santé Publique France avaient fait dire n’importe quoi au Premier ministre Manuel Valls et à la ministre de la Santé Marisol Touraine en surévaluant l’épidémie, en disant que cinq millions de personnes seraient touchées. C’était une erreur méthodologique. Il n’y a jamais eu cinq millions de personnes touchées. Mais il se trouve qu’ils ont revacciné en pleine épidémie. Marisol Touraine disait en substance que, puisque cette épidémie était exceptionnelle, il fallait relancer une campagne de vaccination. Ce qui est un non-sens total. J’avais dit qu’il y aurait au maximum trois millions de personnes infectées. Au final, cette épidémie de grippe a concerné 2,8 millions de personnes.

Cette période n’est pas comparable avec le Covid-19, mais cela nous rappelle des choses. Au bout de deux ans, il y a eu des pressions très fortes sur la fédération de médecins. Ils voulaient rompre notre contrat… Mais, subitement, Santé Publique France trouvait leurs données très bonnes, les ont reprises, puis on a vu éclore Géodes [Géo Données Epidémiologiques de Santé, NDLR]. Santé Publique France fait toujours ce qu’elle veut avec ces données. Leur action a été déplorable parce qu’ils ont toujours œuvré pour la politique du pire. En gros, cela signifie : « J’ouvre le parapluie, je ne prends aucun risque ». In dubio pro malo. Dans le doute, je fais le maximum pour prendre toutes les mesures possibles et prévoir le pire. Ils font toujours cela ! C’est ce que j’appelle et ce que d’aucuns ont appelé « le syndrome du sang contaminé » : « Plus jamais un politique ne devra être traîné devant les tribunaux parce qu’il a mal agi ». On ne prend aucun risque. Je ne leur jette pas la pierre, c’est presque mécanique. Les alarmistes ne prennent aucun risque. Si ce qu’ils prévoient n’arrive pas, ils disent : « C’est grâce à nous ». Si ce qu’ils prévoient arrive, ils disent : « C’est à cause de vous, vous ne nous avez pas écoutés ». Ils gagnent sur tous les tableaux.

 

Il n’y a aucun intérêt à être « rassuriste », nous ne sommes là que pour prendre des coups. Mais nous insistons car nous sommes des chercheurs.

 

Il n’y a aucun intérêt à être « rassuriste », nous ne sommes là que pour prendre des coups. Mais nous insistons car nous sommes des chercheurs, nous n’avons pas de conflits d’intérêt. Aucun. Je dis ce que je vois, et maintenant, vous en faites ce que vous voulez.

En tant qu’autorité sanitaire, Santé Publique France peut répandre une peur invraisemblable : tout le monde s’arrête, tout le monde est tétanisé. Ils font ce qu’ils veulent. Ils décident alors quand on doit avoir peur, quand ils peuvent enfermer tout le monde. C’est magique. On a trouvé la méthode pour faire taire tout le monde. Tout le monde les croit. Il y a un phénomène extraordinaire. Toute cette crise a été un révélateur. Le système hospitalier est à flux tendu, on le savait depuis longtemps, et on le voit à chaque fois qu’il y a une crise. Les crises sont un prisme à travers lequel on voit tout ce qui dysfonctionne[3]NDLR : Lire notre « Trois questions à… » Anne Rasmussen : « Les crises sanitaires exacerbent les problèmes structurels des sociétés », 4 décembre 2021., comme l’hôpital[4]NDLR : Lire notre « Trois questions à… » : Régis Aubry : « Le système de soins actuel favorise une forme de maltraitance par défaut d’humanité », 3 janvier 2023., avec la décision folle de ne s’appuyer que sur lui pour espérer régler la situation. On va ainsi faire des économies sur la médecine de ville, qui aurait dû normalement absorber le choc. On a dit aux gens : « Restez chez vous, ne bougez pas, si ça va vraiment très mal, venez à l’hôpital… ».

 

 

 

 

Le deuxième prisme, c’est l’uniformité du discours médiatique, où tout le monde a agi comme un seul homme. Être aux ordres à ce point-là, c’est totalement désarmant. Il y a également la question de l’échiquier politique. Le gouvernement sonde l’opinion publique, l’opinion publique a peur, et comme on lui a fait peur, elle réclame encore plus de mesures. Nous sommes dans un cercle vicieux, dans une boucle de réactions dont on ne peut pas sortir. Mon rôle, là-dedans, a été de dire – et je l’ai dit très tôt : si on démontre que cette épidémie est mineure, comme tout repose sur la peur de cette dernière, si cela se casse la figure alors tout va s’écrouler. Mais non, c’est comme une clé de voûte, on a beau enlever ce qui est à l’origine, ce qui a permis de construire la peur, cela continue à tenir tout seul. Ce que je dis globalement, et je le redis aujourd’hui, tient en deux mots : l’épidémie de Covid-19 est une épidémie tout à fait bénigne et elle a engendré un monstre.

 

Que pensez-vous du travail de la communauté des épidémiologistes depuis le printemps 2020 ?

Qu’est-ce que « la communauté des épidémiologistes » ? Est-ce que ce n’est pas un fantasme ? La première chose à dire, c’est que, dans la recherche française, la santé publique ne représente presque rien. Au sein de l’Inserm, il n’y a qu’une seule commission qui concerne la santé publique. Une seule sur neuf. Et cette commission est elle-même mélangée avec les technologies de santé. C’est donc lilliputien. Et au sein de la santé publique, l’épidémiologie ne constitue qu’une petite partie. De surcroît, au sein de l’épidémiologie, l’immense majorité des chercheurs travaillent sur autre chose que les maladies infectieuses, et le Covid-19 est une maladie infectieuse. Donc la communauté des scientifiques travaillant sur le sujet représente très peu de monde.

 

Dans la recherche française, la santé publique ne représente presque rien.

 

En France, il y a une école de l’épidémiologie qui a comme base une approche statistique. Ce sont de bons statisticiens mais sans réelle approche mathématique, qui elle est plutôt anglo-saxonne. En gros, il y a deux approches en épidémiologie. Il y a une approche qui est relativement standard : on recueille de l’information et on l’analyse par des statistiques pour comprendre le phénomène observé. Ce sont principalement des polytechniciens s’intéressant à la santé – notamment Daniel Schwartz et Alain-Jacques Valleron – qui ont mis en place cette grande école française de statistique en épidémiologie.

Puis, à côté de ça, il y a une autre façon de voir les épidémies : pour les comprendre, on va modéliser les phénomènes. C’est une approche physico-mathématique de l’épidémie, fondée sur des systèmes d’équations différentielles. C’est plutôt une approche anglo-saxonne. Et il y a là des gens, comme Neil Ferguson, qui peuvent prédire qu’il y aura 500 000 morts en France… Pour comprendre les phénomènes, on modélise ; autrement dit, on simplifie le phénomène. Je ne dis pas qu’il ne faut pas faire de modèles, il faut les faire pour comprendre les choses. Mais ce qu’il ne faut pas faire, c’est les utiliser pour mettre en œuvre des mesures absolument folles.

 

 

Après, il y a le cérémonial dérisoire de la vie en vase clos. À la base, les épidémiologistes sont des hommes qui ont des intérêts personnels. Par exemple : « J’ai 45 ans, j’en ai sué pour en arriver là, je ne vais pas m’enquiquiner. J’ai monté durement un institut, j’ai des contrats, il faut aller chercher l’argent pour payer nos ingénieurs. Je dois garder ces contrats ». Ou alors : « Je dis quelque chose, mon patron dit autre chose, et il va me “taper dessus” ». Tous ces gens-là n’en pensent pas moins, mais ne prennent pas le risque de suivre des scientifiques qui de toute façon ne risquent plus rien – comme Didier Raoult, Christian Perronne, Alexandra Henrion-Caude –, car ils sont sortis du système. Moi, je suis dans le système mais je suis au bord du précipice, je n’attends plus rien, mais je ne peux pas renoncer. Alors, je laisse quelques traces, c’est mon rôle. De même que c’est mon rôle, mon éthique, d’alerter sur des problèmes quand j’en ai connaissance.

 

Nous avons en face de nous des gens qui, au cours du temps, se sont régulièrement trompés. Et le nient.

 

 

Il faut dire ce que l’on voit et ce que l’on croit, même si l’on se trompe. Il n’y a pas de problème à se tromper, le problème c’est de se tromper tout le temps. Et nous avons en face de nous des gens qui, au cours du temps, se sont régulièrement trompés. Et le nient. Or, des tombereaux de publications scientifiques ont montré que les mesures prises étaient débiles. Toute personne qui regarde les choses comme elles sont peut s’en rendre compte. Quand, par exemple, on nous dit : « On va vacciner les gens parce que, justement, ça fait un taux de couverture vaccinale suffisant pour arrêter l’épidémie »[5]NDLR : Lire notre « Grand Entretien » avec Laurent Mucchielli : « L’idéologie de la vaccination intégrale n’est ni de la science ni de la médecine », 1er octobre 2021. et qu’on n’a jamais eu autant de gens touchés, on se dit soit la mesure n’est pas bonne, soit le vaccin n’est pas bon. Il faut choisir. Soit on nous raconte des histoires avec les tests, soit le vaccin ne fonctionne pas. Tout le monde s’est aperçu de ça. Et maintenant, les doutes sur la vaccination sont très grands.

Il y a également la question du glissement sémantique de ce qu’est un « cas ». Cela a été l’une des manipulations les plus monstrueuses. Initialement, les cas, ce sont de vrais malades. Or, actuellement, dans ce que l’on appelle des cas, il y a des malades, mais ils sont ultra-minoritaires. Quand on nous dit « Il y a 500 000 cas aujourd’hui », tout le monde pense que ce sont des gens malades. Ce sont juste des cas où l’on a trouvé quelque part une trace de quelque chose qui répond à un test positif. Certains sont peut-être au pas de la mort, d’autres n’ont rien du tout et, entre les deux, il y a ceux qui ont un rhume, une grippe cognée, etc.

 

La science est entrée en religion positiviste : c’est la religion scientiste.

 

Sur un autre plan, la nouvelle religion, c’est la science[6]NDLR : Lire la tribune libre de Daniel Cérézuelle, Pour en finir avec le dogme de l’Immaculée Conception de la science, 10 janvier 2017.. On a cru que la médecine, c’était de la science[7]NDLR : Lire notre « Trois questions à… » Jacques Testart : « La gestion de l’urgence s’accorde mal avec la science », 29 avril 2020.. On a « scientificisé » la médecine et, corollairement, il y a une médicalisation invraisemblable. Quelque part, on a oublié dans notre civilisation que la vie c’est autre chose qu’une vie bassement matérielle, que nous sommes ici uniquement de passage, et que la vraie vie est ailleurs. Tout cela a été perdu. Cette perte d’au-delà fait porter à l’existence terrestre un lourd fardeau. Et donc, être malade est devenu profondément angoissant. La science est ainsi entrée en religion positiviste : c’est la religion scientiste.

On a rationalisé la médecine, mais, paradoxalement, cette dernière reste teintée d’irrationnel. Prendre une pilule, c’est quand même avoir une confiance invraisemblable envers ceux qui l’ont fabriquée ! Dit autrement, quand on mange, on voit et on sait ce que l’on mange. Quand on prend une pilule, cela peut être n’importe quoi, on ne sait pas ce qu’il y a dedans. C’est une chimie, et il faut croire que ça marche. Alors, on nous dit « Cela fonctionne parce que moi j’ai une blouse blanche et j’ai fait des études, c’est moi le scientifique ici ». Mais ce n’est pas de la rationalisation, c’est une croyance dans le savoir de l’autre. Et il y a là une délégation de pouvoir.

Propos recueillis par Édouard V. Piely, journaliste / Sciences Critiques.

 

 

References

References
1 NDLR : Lire notre « Trois questions à… » Richard-Emmanuel Eastes : « Le complotisme est le symptôme des dérèglements du monde », 25 novembre 2022.
2 NDLR : Voir notre dossier spécial « Covid-19 ».
3 NDLR : Lire notre « Trois questions à… » Anne Rasmussen : « Les crises sanitaires exacerbent les problèmes structurels des sociétés », 4 décembre 2021.
4 NDLR : Lire notre « Trois questions à… » : Régis Aubry : « Le système de soins actuel favorise une forme de maltraitance par défaut d’humanité », 3 janvier 2023.
5 NDLR : Lire notre « Grand Entretien » avec Laurent Mucchielli : « L’idéologie de la vaccination intégrale n’est ni de la science ni de la médecine », 1er octobre 2021.
6 NDLR : Lire la tribune libre de Daniel Cérézuelle, Pour en finir avec le dogme de l’Immaculée Conception de la science, 10 janvier 2017.
7 NDLR : Lire notre « Trois questions à… » Jacques Testart : « La gestion de l’urgence s’accorde mal avec la science », 29 avril 2020.

Un commentaire

  1. Pierre Chaillot expliquerait que les équations différentielles de propagation des maladies utilisées par ces modèles mathématiques conduisent forcément à une solution exponentielle.
    ????

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