« La science est une chose trop importante pour être laissée entre les mains des seuls savants. » (Carl E. Sagan)

Nous recommandons

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NOS AMIS

 

> Basta ! est un média indépendant centré sur l’actualité économique, sociale et environnementale.

> Les Médias Libres, « le portail de la presse indépendante ».

> Reporterre, « le quotidien de l’écologie », informe sur les liens entre la crise écologique, les injustices sociales et les menaces sur les libertés.

> Moins !, journal romand d’écologie politique, aspire à promouvoir et à diffuser les idées de la décroissance.

> Rézo, « le portail des copains », est « un petit portail en bois, modeste et génial. »

> Les Jours Heureux est un mouvement intergénérationnel citoyen qui souhaite faire advenir une société du « bien vivre », plus juste, plus équitable, plus responsable, plus soutenable… plus heureuse !

> Mouvement Utopia est une association d’éducation populaire qui vise à élaborer un projet de société solidaire, écologiquement soutenable et convivial, dont l’objectif est le « buen vivir ».

> Le Collectif Osef est un collectif informel composé de toutes les associations et autres structures militantes opposées à la « startupisation de l’économie française ».

> Les Amis de Bartleby

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NOS LIENS UTILES

 

> Fondation Sciences Citoyennes est une association qui a pour objectif de favoriser et prolonger le mouvement actuel de réappropriation citoyenne et démocratique de la science, afin de la mettre au service du bien commun.

> Technologos est une association qui se donne pour objectif d’impulser une réflexion et un débat public sur l’influence de la technique sur les mentalités ainsi que sur les modes de vie et la plupart des choix politiques et économiques.

> Science et Société est un lieu de ressources, d’échanges et de réflexions entre chercheurs et acteurs de terrain autour du thème des relations entre sciences et société.

> Alliage propose une réflexion de fond sur les rapports de la culture, de la technoscience et de la société.

> Et vous n’avez encore rien vu…, blog critique de la science et du scientisme ordinaire.

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NOTRE BIBLIOTHÈQUE

 

> Survivre et Vivre. Critique de la science, naissance de l’écologie

Ouvrage collectif, coordonné par Céline Pessis, doctorante en histoire à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS).

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> Éditions L’Échappée. Collection Frankenstein. Février 2014. 480 pages. 25 euros.

Dans l’après 68, Survivre et Vivre, le mouvement de scientifiques critiques rassemblés autour du grand mathématicien Alexandre Grothendieck, dénonce la militarisation de la recherche et l’orientation mortifère du développement technoscientifique. Rapidement devenus les fers de lance d’une fronde antiscientiste, ces « objecteurs de recherche » sont des acteurs de premier plan dans l’émergence du mouvement écologique français. Aux côtés de Pierre Fournier, ils participent à l’essor du mouvement antinucléaire. Lié aux objecteurs de conscience, à des mouvements hygiénistes et naturistes, à des agrobiologistes et des naturalistes, Survivre et Vivre prône la subversion culturelle et essaime en une vingtaine de groupes locaux. Proche de Robert Jaulin, Serge Moscovici et Bernard Charbonneau, il s’affirme comme le « laboratoire idéologique de la révolution écologique ».

Éditée par le mouvement de 1970 à 1975, elle fut la première revue d’écologie politique influente. Des contributions d’anciens membres de Survivre et Vivre mettent en perspective cette expérience collective et ses cheminements d’hier à aujourd’hui.

Textes à l’appui, ce livre offre aussi un panorama plus large de la critique des sciences des années 1970. A l’heure du capitalisme vert, il invite ainsi à renouer avec les racines critiques de l’écologie politique et à s’abreuver à sa joyeuse radicalité.

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> La science asservie. Santé publique : les collusions mortifères entre industriels et chercheurs

D’Annie Thébaud-Mony, sociologue, directrice de recherches honoraire à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm).

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> Éditions La Découverte. Collection Cahiers Libres. Novembre 2014. 224 pages. 21 euros.

Dans les discours politiques, la science est aujourd’hui de plus en plus convoquée pour énoncer des vérités incontestables. Pourtant, suite à de nombreux scandales sanitaires, un climat de suspicion s’est installé, creusant un fossé entre les chercheurs et les citoyens. Chacun est alors confronté à ces questions essentielles s’agissant de la santé : qui croire ? Que nous cache-t-on ? A qui profite la science ?

Ces questions sont au coeur de ce livre, qui analyse comment de nombreux chercheurs ont participé à un processus de confiscation de la science au service des intérêts privés de grands groupes industriels, souvent avec la complicité active de l’État. Ils ont ainsi contribué à instaurer l’hégémonie d’une « stratégie du doute » quant aux risques industriels (amiante, plomb, nucléaire, pesticides, etc.) et à leurs conséquences.

S’appuyant sur sa propre expérience professionnelle et sur celle d’Henri Pézerat, toxicologue connu pour son engagement scientifique et citoyen contre l’amiante, Annie Thébaud-Mony dénonce ici avec force le cynisme et l’impunité de ceux qui, délibérément, ont choisi la mort des autres pour leur plus grand profit. Ses révélations dressent un réquisitoire implacable, qui invite à résister à l’imposture scientifique et à mettre en synergie, en matière de santé publique, savoirs scientifiques et savoirs citoyens.

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> La fabrique du mensonge. Comment les industriels manipulent la science et nous mettent en danger

De Stéphane Foucart, journaliste scientifique au Monde.

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> Éditions Denoël. Collection Impacts. Mars 2013. 304 pages. 17 euros.

Un pan entier de l’activité des grandes entreprises consiste aujourd’hui à manipuler la science. Confrontés aux faits, les industriels utilisent le discours scientifique comme un instrument de propagande pour installer le doute.

Les fabricants de tabac sont les premiers à avoir recruté des faux experts, fait publier des études biaisées, organisé des fausses conférences scientifiques et corrompu des sociétés savantes afin de convaincre que le tabac n’était peut-être pas responsable du cancer du poumon.

Les mêmes procédés ont été remis au goût du jour pour dédouaner l’amiante de ses méfaits, pour relativiser ou nier le réchauffement climatique, pour faire du déclin des abeilles un « mystère » sans lien avec les nouvelles générations d’insecticides. Ils sont également à l’œuvre dans l’affaire du bisphénol A, l’un des plus graves scandales sanitaires de ces dernières décennies.

Quant au « débat » sur les organismes génétiquement modifiés (OGM), cela fait bien longtemps qu’il n’a plus rien à voir avec la science. Les intérêts en jeu sont trop colossaux pour laisser les chercheurs s’exprimer librement…

Au-delà de tout militantisme, La Fabrique du mensonge décortique les mécanismes de ces manœuvres et montre comment abîmer la science et détruire le savoir met nos vies en danger.

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> Une autre science est possible ! Manifeste pour un ralentissement des sciences
(suivi de Le poulpe du doctorat de William James, présenté par Thierry Drumm)

D’Isabelle Stengers, docteur en philosophie, enseignante à l’Université Libre de Bruxelles.

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> Éditions La Découverte. Collection Les empêcheurs de penser en rond. Janvier 2013. 200 pages. 16,50 euros.

Comme le fast food, la fast science, c’est vite fait, pas bon et pas très digeste ! Une économie spéculative — avec ses bulles et ses krachs — s’est emparée de la recherche scientifique : les chercheurs doivent intéresser des « partenaires » industriels, participer aux jeux guerriers de l’économie compétitive. Conformisme, compétitivité, opportunisme et flexibilité : c’est la formule de l’excellence. Mais comment poser publiquement la question d’un désastre lorsque l’on ne veut pas que le public perde confiance en « sa » science ? Les mots d’ordre comme « Sauvons la recherche » font consensus, alors qu’ils ne posent surtout pas la bonne question : « De quoi faut-il la sauver ? »

Isabelle Stengers montre que les chercheurs doivent cesser de se prendre pour le « cerveau pensant, rationnel, de l’humanité », refuser que leur expertise serve à faire taire l’inquiétude de l’opinion, à propager la croyance en un progrès scientifique inéluctable capable de résoudre les grands problèmes de société. Il s’agit pour eux de nouer des liens avec un public potentiellement intelligent et curieux, c’est-à-dire aussi de produire des savoirs dignes de cette ambition.

En 1903, le philosophe américain William James (1842-1910) publiait « Le poulpe du doctorat ». Il éprouvait une telle répugnance vis-à-vis de l’enseignement académique qu’il se présentait comme un outsider, voire un charlatan. Au regard des plus récentes inventions institutionnelles visant à évaluer les chercheurs, les examens auxquels James s’en prend apparaissent pourtant comme d’innocents archaïsmes… Le poulpe enlace les chercheurs plus puissamment que jamais.

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> La science, creuset de l’inhumanité. Décoloniser l’imaginaire occidental

De Jean-Marc Royer, diplômé de l’École Nationale d’Aviation Civile et de l’Université Paris-VIII en histoire.

> Éditions L’Harmattan. Collection Questions contemporaines. Mai 2012. 218 pages. 23 euros.

L’homme occidental est devenu la principale force de transformation du globe terrestre et de son atmosphère depuis 1850. De plus, Günther Anders, dans L’Obsolescence de l’homme, a largement montré pourquoi cela menait le monde à sa perte totale, en particulier depuis les événements de 1945.

D’autre part, Cornelius Castoriadis avait attiré l’attention sur le fait que l’imaginaire constitue le ciment de toute société. En conséquence, l’auteur soutient qu’il est grand temps de « déconstruire » cet imaginaire occidental si l’on veut se donner des chances d’éviter le pire.

Or, cet ouvrage a débouché sur la conclusion que la science tient une place fondamentale dans cet imaginaire et, chemin faisant, que l’énergie nucléaire en constitue son « noyau dur ».

L’exploration douloureuse de cette « zone interdite » du savoir — qui s’est révélée extraordinairement riche — a eu pour conséquence un appel international.

Signé par des personnes et des philosophes qui importent à l’auteur, cet appel constitue aussi leur modeste don au peuple japonais.

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> Un futur sans avenir. Pourquoi il ne faut pas sauver la recherche scientifique

Du Groupe Oblomoff, formé en 2004 « contre l’emprise de la technocratie et du scientisme sur nos vies. »

> Editions L’Echappée. 2009. 128 pages. 9 euros.

« Nous appelons à établir les liens encore possibles entre toutes les personnes qui, issues ou non du milieu scientifique, entendent résister en acte à l’avancée de la technoscience. La question n’est pas de rapprocher la science du citoyen, mais de casser la logique de l’expertise, de dénoncer le mensonge de la neutralité de la recherche et d’empêcher la science contemporaine de contribuer, au jour le jour, à détruire la politique en la transformant en une affaire technique. »

 

 

 

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> L’invention de la science. La nouvelle religion de l’âge industriel

De Guillaume Carnino, docteur en histoire et professeur d’histoire des sciences et des techniques à l’Université de Compiègne.

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> Seuil. Collection L’Univers historique. Avril 2015. 384 pages. 24 euros.

« La science a prouvé que… ». D’où nous vient cette idée selon laquelle la science serait garante du vrai ?

Guillaume Carnino propose une enquête historique et généalogique permettant de comprendre pourquoi et comment, en France, à l’heure de la IIIème République, cette idée en est venue à être unanimement partagée. Il dévoile les rouages de la carrière de savants comme Louis Pasteur, mais aussi l’histoire de simples artisans et pêcheurs dont les découvertes furent convoitées par les industriels. Il montre de quelle manière l’image d’un Galilée anticlérical a pu être fabriquée et renouvelle le regard que l’on porte sur la mise en place de l’école gratuite et obligatoire par Jules Ferry.

Parallèlement à la décision démocratique, la pratique scientifique devient peu à peu un mode de gouvernement des êtres et des choses, qui marque l’avènement de la civilisation des experts. La science, désormais auréolée d’un prestige quasi religieux et présentée comme pure — c’est-à-dire indifférente aux intérêts individuels —, se révèle finalement un moyen d’administrer la société autant que de transformer la nature par l’industrie.

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> La science expliquée à mes petits-enfants

De Jean-Marc Lévy-Leblond, physicien, professeur émérite de l’Université de Nice, directeur de la revue Alliage.

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> Seuil. Collection Expliqué à… Septembre 2014. 112 pages. 8 euros.

Ce que la science sait est une chose, ce que la science est en est une autre.

Un physicien, amateur d’histoire et de philosophie des sciences, discute avec sa petite-fille : À quoi sert la science ? Quel rôle joue-t-elle dans la société ? Pourquoi y a-t-il des sciences différentes ? Que font vraiment les chercheurs dans leurs laboratoires ? La science pourra-t-elle tout expliquer ?

L’activité scientifique, on ne le dit pas assez aux collégiens et lycéens, est étroitement liée aux autres pratiques humaines. Il faut donc comprendre ce que la science a de spécifique, son évolution au cours des siècles, sa place dans la culture, ses rapports avec la technique, la politique, voire avec le sport ou la religion.

Ce dialogue, à contre-courant de nombre d’idées reçues, nous fait partager les interrogations mais aussi les plaisirs que peuvent susciter les sciences.

 

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> Histoire des sciences et des savoirs

Collectif dirigé par Dominique Pestre, historien des sciences, directeur d’étude à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS).

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> Seuil. Collection Science ouverte. Octobre 2015. 468 et 516 pages. 38 euros.

Tome I. De la Renaissance aux Lumières
Dirigé par Stéphane Van Damme

Tome II. Modernité et globalisation
Dirigé par Kapil Raj et H. Otto Sibum

Tome III. Le siècle des technosciences
Dirigé par Christophe Bonneuil et Dominique Pestre

Voici enfin une vaste synthèse éclairant l’histoire des sciences et des savoirs depuis la Renaissance, qui offre un nouveau regard sur les sciences − y compris de l’homme et de la société − et les techniques, inscrites dans les savoirs, les cultures, les sociétés, les sensibilités et les formes de gouvernement de leur époque.

Les trois tomes s’enchaînent selon une logique chronologique (1. De la Renaissance aux Lumières ; 2. Modernité et globalisation, 1770-1914 ; 3. Le siècle des technosciences, depuis 1914) mais sont structurés selon une même organisation thématique. Ils dégagent, dans un premier temps, ce qu’est la science à chaque époque et comment elle s’inscrit dans la société et la culture de la période, puis offrent un panorama approfondi de l’évolution des principaux champs et disciplines phares, et enfin replacent les évolutions scientifiques dans l’histoire globale et dans les enjeux de gouvernement (de la nature, des corps, des savoirs, de la société, du progrès, de ses risques, etc.).

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> La critique de la science depuis 1968. Critique des sciences et études des sciences en France après Mai-68

De Renaud Debailly, maître de conférences en sociologie à l’Université Paris-Sorbonne, chercheur au sein du Groupe des Méthodes de l’Analyse Sociologique de la Sorbonne (GEMASS).

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> Editions Hermann. Collection Société et pensées. Novembre 2015. 212 pages. 25 euros.

Les sciences et la société moderne sont inextricablement liées. Les catastrophes sanitaires et écologiques (Organismes Génétiquement Modifiés, vache folle, Tchernobyl, etc.) ont contribué à affaiblir leurs perceptions distinctes en raison du statut des sciences, vues à la fois comme des sources potentielles de danger, mais aussi comme la solution permettant de surmonter les risques encourus.

Au-delà de ces catastrophes et de ces affaires portées sur la scène publique, cet ouvrage invite à considérer, dans le contexte d’un processus de politisation inédit au sein de la sphère scientifique, l’émergence d’une nouvelle conception des relations entre sciences et société.

A travers l’étude des mouvements de critique des sciences en France après Mai-68 et le renouvellement des disciplines consacrées à l’étude des sciences au cours de la même période, il s’agira de mieux cerner les contours d’un discours refusant de distinguer la science de la société et d’en mesurer la portée.

Se développe ainsi en France une politisation originale de la science qui se diversifie au début des années 1980 sous l’influence des questions environnementales et sanitaires.

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> Le prix de la démesure. Retrouver une société humaine

De Simon Charbonneau, juriste spécialiste du droit de l’environnement, ancien maître de conférences à l’Institut Universitaire de Technologie « Hygiène Sécurité Environnement » de Bordeaux, chercheur au Laboratoire d’Automatique et de Productique (LAP) de l’Université de Bordeaux-I.

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> Libre & Solidaire. Septembre 2015. 252 pages. 16,90 euros.

« Comment se fait-il que l’humanité moderne se retrouve dans un tel désarroi, face à un monde où s’accumulent des menaces aussi multiples qu’imprévues ? » : cette question, tout le monde se la pose aujourd’hui…

Les réponses se situent dans le droit-fil de la pensée critique du monde moderne qui a guidé l’oeuvre de Bernard Charbonneau et celle de Jacques Ellul, ainsi que d’autres auteurs restés méconnus du fait du règne castrateur de l’idéologie progressiste.

Cette démarche part de constats d’ordre historique relatifs à la course à la puissance initiée par l’Occident depuis la révolution industrielle. Et cela a pour conséquence le dépassement de toutes les limites : des transports toujours plus rapides, des moyens de communication toujours plus denses, une surinformation permanente… qui plongent l’humanité dans le désarroi.

L’analyse de ce processus prométhéen, insiste particulièrement sur les mutations survenues depuis une cinquantaine d’années et sur la complicité que nous vivons comme une tragique malédiction.

Cette réflexion induit une certaine conception des relations de l’homme aux autres et à la nature. Si nous avons un avenir à imaginer, c’est celui d’un monde à l’échelle humaine.

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> Lettre ouverte aux scientistes. Alternatives démocratiques à une idéologie cléricale

De Matthieu Calame, ingénieur agronome, directeur de la Fondation Charles Léopold Mayer pour le progrès de l’Homme.

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> Editions Charles Léopold Mayer. Avril 2011. 152 pages. 18 euros.

La technique et les productions scientifiques jouent un rôle croissant dans notre monde contemporain. Qu’il s’agisse du droit, de l’économie, de la politique voire de l’éthique et de la vie sentimentale, bon nombre de décisions sont prises en fonction de l’avis d’experts. Cette évolution semble réaliser le souhait d’Ernest Renan d’ « organiser scientifiquement l’humanité ».

Matthieu Calame, ingénieur de formation, soulève ici la question de la bataille idéologique qui se déroule autour du mot « science » dans nos sociétés contemporaines. Pour contrer ceux qui souhaiteraient établir une république des experts, il défend le principe d’une recherche scientifique qui, compte tenu des enjeux et des défis, joue pleinement le jeu de la démocratie.

 

 

 

 

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> Le mythe de la culture numérique

De Philippe Godard, essayiste, directeur de collection d’ouvrages jeunesse.

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> Editions Le Bord de l’eau. Novembre 2015. 156 pages. 16 euros.

Existe-t-il une culture numérique authentique, qui se distingue réellement de la « culture d’avant », celle qu’incarne le livre ? A bien y réfléchir, la réponse ne va pas de soi… Il n’est pas certain que ce que l’on appelle banalement la « culture numérique » soit autre chose que du bricolage numérique − ce qui reste à démontrer car la « culture numérique » ou « l’entrée de l’école dans le monde numérique », pour ne prendre que ces deux expressions à succès, semblent surtout… impensées. La culture numérique serait donc un mythe ?

L’auteur ne se contente pas de questionner notre époque, il cherche à éclairer « l’avenir numérique ». Quel est l’avenir de l’humain qui produit une telle culture ? Sommes-nous déjà des post-humains, des surhommes dans une version que Nietzsche aurait sans guère de doutes désavouée ? Ou ne s’agit-il au contraire que d’un ballon de baudruche déjà en train de se dégonfler sous les coups portés par ceux-là mêmes qui espéraient en faire une bulle globale, et pas seulement financière, à savoir tous les marchands qui se sont emparés du web ? Ces marchands qui ne sont pas que des marchands semblent être les seuls à avoir une vision stratégique, tandis qu’autour d’eux, le web reste globalement « impensé ».

Le mythe de la culture numérique entend contribuer à l’effort nécessaire pour penser un autre monde numérique… que celui dominé par les marchands adversaires résolus de la culture classique.

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> Comment tout peut s’effondrer. Petit manuel de collapsologie à l’usage des générations présentes

De Pablo Servigne, ingénieur agronome, docteur en biologie, et Raphaël Stevens, éco-conseiller.

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> Seuil. Collection Anthropocène. Avril 2015. 304 pages. 19 euros.

Et si notre civilisation s’effondrait ? Non pas dans plusieurs siècles, mais de notre vivant. Loin des prédictions Maya et autres eschatologies millénaristes, un nombre croissant d’auteurs, de scientifiques et d’institutions annoncent la fin de la civilisation industrielle telle qu’elle s’est constituée depuis plus de deux siècles. Que faut-il penser de ces sombres prédictions ? Pourquoi est-il devenu si difficile d’éviter un tel scénario ?

Dans ce livre, Pablo Servigne et Raphaël Stevens décortiquent les ressorts d’un possible effondrement et proposent un tour d’horizons interdisciplinaire de ce sujet − fort inconfortable − qu’ils nomment la « collapsologie ». En mettant des mots sur des intuitions partagées par beaucoup d’entre nous, ce livre redonne de l’intelligibilité aux phénomènes de « crises » que nous vivons, et surtout, redonne du sens à notre époque. Car aujourd’hui, l’utopie a changé de camp : est utopiste celui qui croit que tout peut continuer comme avant. L’effondrement est l’horizon de notre génération, c’est le début de son avenir. Qu’y aura-t-il après ? Tout cela reste à penser, à imaginer, et à vivre…

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> La comédie atomique. L’histoire occultée des dangers des radiations

D’Yves Lenoir, ingénieur de formation, président de l’association « Enfants de Tchernobyl Belarus ».

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> Editions La Découverte. Collection Cahiers Libres. Avril 2016. 320 pages. 22 euros.

Le bilan humain de la catastrophe de Tchernobyl d’avril 1986 a été définitivement figé avec le rapport adopté en 2006 par l’Organisation des Nations-Unies (ONU) et les gouvernements biélorusse, russe et ukrainien. Ce bilan minore considérablement le nombre de victimes, car il « ignore » de nombreuses séquelles constatées chez les millions de personnes exposées aux retombées radioactives et chez les 800 000 « liquidateurs » de l’accident. Et, en octobre 2011, un expert russe qui avait coordonné la rédaction de ce rapport a affirmé au Japon que la santé de la population touchée par les rejets radioactifs de la catastrophe de Fukushima, en mars 2011, ne serait pas affectée…

Comment expliquer cette scandaleuse culture du déni des effets de la radioactivité ? En se plongeant dans les archives, en remontant aux premiers usages intensifs des rayons X et du radium. C’est ce qu’a fait Yves Lenoir pour ce livre où il retrace la surprenante histoire de la construction progressive d’un système international de protection radiologique hors normes au sein de l’ONU, qui minore systématiquement les risques et les dégâts des activités nucléaires.

On apprend ainsi comment les promesses de l’« énergie atomique » civile ont fait l’objet dans les années 1950 d’une intense propagande au niveau mondial : non seulement cette énergie satisfera sans danger les besoins de l’humanité, mais l’usage généralisé de faibles doses de radioactivité permettra de décupler la production agricole ! Surtout, Yves Lenoir révèle que les normes de protection des travailleurs de l’énergie atomique ou des populations qui pourraient être exposées après un accident nucléaire ont été définies par une poignée d’experts, en dehors de tout contrôle démocratique. Il explique leurs méthodes pour construire une « vérité officielle » minimisant les conséquences de Tchernobyl. Et comment ces procédés ont été mis en œuvre, en accéléré, après Fukushima. Une remarquable enquête historique, riche de nombreuses révélations.

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> Cerveau augmenté, homme diminué

De Miguel Benasayag, philosophe, psychanalyste.

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> Editions La Découverte. Collection Sciences Humaines. Mai 2016. 200 pages. 18 euros.

Le cerveau humain connaît, étudie, explique et comprend, au point qu’il en est arrivé à prendre comme objet d’étude… lui-même. Et les nouvelles connaissances sur le fonctionnement du cerveau ébranlent profondément nombre de croyances au fondement de la culture occidentale. Car les remarquables avancées des neurosciences rendent en effet désormais envisageable pour certains la perspective d’améliorer le cerveau et de supprimer ses faiblesses et ses « défauts » : le rêve d’un cerveau « parfait » semble à portée de main.

Cette vision conduit à considérer notre cerveau comme un ordinateur qu’il s’agirait d’optimiser en l’améliorant par divers outils pharmacologiques ou informatiques. A partir d’une vulgarisation très pédagogique de recherches récentes souvent très « pointues » en neurosciences, Miguel Benasayag montre ici, de façon fort convaincante, pourquoi ce nouvel idéalisme du « cerveau augmenté » est en réalité une illusion dangereuse : le monde qu’entendent préparer les transhumanistes et certains scientifiques risque fort d’être surtout habité par la folie et la maladie…

Une thèse critique solidement argumentée, qui a commencé à faire son chemin dans le milieu des chercheurs les plus préoccupés par les apories et les failles de ce nouveau mythe du progrès.

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> La gouvernance par les nombres

D’Alain Supiot, juriste, professeur au Collège de France.

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> Editions Fayard. Collection Poids et mesures du monde. Mars 2015. 512 pages. 22 euros.

Le sentiment de « malaise dans la civilisation » n’est pas nouveau, mais il a retrouvé aujourd’hui en Europe une intensité sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale.

La saturation de l’espace public par des discours économiques et identitaires est le symptôme d’une crise dont les causes profondes sont institutionnelles. La Loi, la démocratie, l’État, et tous les cadres juridiques auxquels nous continuons de nous référer, sont bousculés par la résurgence du vieux rêve occidental d’une harmonie fondée sur le calcul.

Réactivé d’abord par le taylorisme et la planification soviétique, ce projet scientiste prend aujourd’hui la forme d’une gouvernance par les nombres, qui se déploie sous l’égide de la « globalisation ». La raison du pouvoir n’est plus recherchée dans une instance souveraine transcendant la société, mais dans des normes inhérentes à son bon fonctionnement. Prospère sur ces bases, un nouvel idéal normatif, qui vise la réalisation efficace d’objectifs mesurables plutôt que l’obéissance à des lois justes.

Porté par la révolution numérique, ce nouvel imaginaire institutionnel est celui d’une société où la loi cède la place au programme et la réglementation à la régulation. Mais dès lors que leur sécurité n’est pas garantie par une loi s’appliquant également à tous, les hommes n’ont plus d’autre issue que de faire allégeance à plus fort qu’eux.

Radicalisant l’aspiration à un pouvoir impersonnel, qui caractérisait déjà l’affirmation du règne de la loi, la gouvernance par les nombres donne ainsi paradoxalement le jour à un monde dominé par les liens d’allégeance.

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> Le désastre de l’école numérique. Plaidoyer pour une école sans écrans

De Philippe Bihouix, ingénieur centralien, et Karine Mauvilly, historienne, juriste.

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> Seuil. Août 2016. 240 pages. 17 euros.

Pendant que certains cadres de la Silicon Valley inscrivent leurs enfants dans des écoles sans écrans, la France s’est lancée, sous prétexte de « modernité », dans une numérisation de l’école à marche forcée − de la maternelle au lycée. Un ordinateur ou une tablette par enfant : la panacée ? Parlons plutôt de désastre.

L’école numérique, c’est le choix pédagogique irrationnel, car on n’apprend pas mieux − et souvent moins bien − par l’intermédiaire d’écrans. C’est le gaspillage de ressources rares et la mise en décharge sauvage de déchets dangereux à l’autre bout de la planète. C’est une étonnante prise de risque sanitaire quand les effets des objets connectés sur les cerveaux des jeunes demeurent mal connus. C’est ignorer les risques psycho-sociaux qui pèsent sur des enfants déjà happés par le numérique.

Cet essai s’adresse aux parents, enseignants, responsables politiques, citoyens qui s’interrogent sur la pertinence du « plan numérique pour l’école ». Et s’il fallait au contraire faire de l’école une zone refuge, sans connexions ni écrans, et réinventer les pistes non numériques du vivre-ensemble ?

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> L’homme, cet animal raté. Histoire naturelle de notre espèce

De Pierre Jouventin, éco-éthologue, ancien directeur de recherche en éthologie des oiseaux et des mammifères au Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS).

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> Libre & Solidaire. Septembre 2016. 240 pages. 21,90 euros.

Si l’homme n’était pas le sommet de l’évolution, contrairement à ce qu’il se raconte depuis 2 000 ans ? Il n’a pas su prévoir que l’accroissement de la population se ferait plus vite que celui des ressources alimentaires et n’a pas compris qu’il ne pouvait y avoir un développement infini dans un monde fini.

Et si ce dont il est si fier et qui fait, paraît-il, sa supériorité sur l’animal − la raison, la culture, le langage et la morale − n’était pas une supériorité, mais une entrave… Si tous ces dons avaient été gâchés, détournés ?

Pourquoi, avec son intelligence, n’a-t-il pas su éviter la surpopulation et l’épuisement des ressources naturelles alors que les animaux se régulent depuis toujours ?

Pourquoi, malgré sa technologie et son industrie, se trouve-t-il de plus en plus cerné par les pollutions ? Son orgueil lui a-t-il fait ignorer que les lois de la nature s’appliquent aussi à l’espèce humaine ?

Pourquoi Homo sapiens, autrement dit celui qui sait, celui qui a découvert l’agriculture, l’élevage, la civilisation, s’est-il fait piéger par le changement climatique et les conflits politico-religieux qui aboutissent aujourd’hui à des guerres et aux déplacements des populations ?

Cette enquête sur notre espèce n’est pas idéologique, mais naturaliste. Elle s’appuie sur les découvertes récentes de la science, particulièrement en écologie, éthologie, évolution génétique et préhistoire.

L’homme est-il devenu un inadapté de la nature, un animal raté ?

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> Changement climatique. Histoire et enjeux

De Jacques Merle, Bruno Voituriez et Yves Dandonneau, océanographes, directeurs de recherche émérites de l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD).

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> Editions L’Harmattan. Septembre 2016. 352 pages. 36 euros.

Les sciences de la Terre ont connu, ces dernières décennies, une mutation historique avec la prise de conscience du changement climatique.

Les auteurs, chercheurs océanographes, entrés dans la carrière au début des années 1960, ont été les témoins et les acteurs d’une aventure scientifique sans précédent rassemblant des milliers de chercheurs, du Nord et du Sud, et relevant de plusieurs spécialités des sciences de la Terre.

Ils ont vécu de l’intérieur ces transformations et racontent l’évolution des idées, l’avancée des connaissances et les événements sociopolitiques qui se sont enchaînés et entrecroisés depuis la deuxième moitié du XXème siècle jusqu’à nos jours, pour arriver à la perception actuelle, en 2016, que l’humanité a du changement climatique en cours.

Ils pointent les étapes essentielles, les convergences plus ou moins fortuites, logiques ou contraintes, de disciplines scientifiques jusque-là séparées et cloisonnées, venues s’assembler comme les pièces d’un puzzle autour de la question climatique, sous l’impulsion de quelques personnalités déterminantes dont ils évoquent les avancées scientifiques les plus marquantes.

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> Idéaux politiques

De Bertrand Russell, mathématicien et philosophe anglais (1872-1970).
(Présentation et traduction de Normand Baillargeon et Chantal Santerre)

> Ecosociété. Collection Retrouvailles. Janvier 2017. 112 pages. 15 euros.

Dans cet ouvrage de philosophie politique écrit dans le tumulte de la Première Guerre mondiale, le célèbre mathématicien et philosophe anglais Bertrand Russell avance que l’humanité court à sa perte et qu’il est impératif de modifier en profondeur notre manière de vivre, de penser, d’éduquer, de produire et de consommer, bref qu’il est absolument nécessaire de transformer le monde. Mais par-dessus tout, Russell nous rappelle à quel point la formulation d’idéaux doit être au coeur de tout engagement politique.

Capitalisme et socialisme, nationalisme et internationalisme, organisation du travail, progrès, liberté individuelle… Le texte tiré de conférences publiées pour la première fois en 1917 offre un condensé clair et accessible des positions que le philosophe défendra tout au long de sa vie. Dans cette première traduction intégrale en français de Political Ideals, présentée avec brio par Normand Baillargeon et Chantal Santerre, on retrouve le lyrisme, mais également l’humour et l’ironie qui caractérisent si bien Russell.

Un essai incontournable pour quiconque veut s’initier à la pensée sociale et politique de ce philosophe considéré comme l’un des plus importants penseurs du XXème siècle.

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> Et nous vivrons des jours heureux

100 auteurs, 120 actions pour résister et créer.

> Actes Sud Sciences Humaines. Novembre 2016. 176 pages. 10 euros.

« Nous appelons à définir ensemble un nouveau programme de résistance : pour nous, résister c’est créer. »

Reprenant cet appel lancé en 2004 par treize anciens résistants, 100 citoyens, tous reconnus dans leur domaine, ont conjugué leurs réflexions et leurs expériences pour élaborer un nouveau projet, #LesJoursHeureux. Sur la démocratie, le vivre-ensemble, l’économie, l’écologie, ils proposent un cap à suivre et 120 actions immédiates. Pour qu’au brouillard de notre époque succèdent des jours heureux !

Parmi ces 100 contributeurs :

Geneviève Azam, Marie-Odile Bertella-Geoffroy, Dominique Bourg, Anne Bringault, Sandrine Buresi, Valérie Cabanes, Matthieu Calame, Fanny Charasse, Thomas Coutrot, Roland Desbordes, Philippe Desbrosses, Marc Dufumier, Jean Gadrey, Dominique Gauzin-Mülleer, Gaël Giraud, Jean-Claude Guillebaud, Guy Kastler, Didier Lambert, Lylian Le Goff, Frédéric Le Manach, Corinne Lepage, Pierre Lieutaghi, Gus Massiah, Mohamed Mechmache, Dominique Méda, Claire Nouvian, Anne-Sophie Novel, Serge Orru, Isabelle Pelloux, Jean-Marie Perbost, Edwy Plenel, Dominique Plihon, Paul Quilès, Tristan Rechid, Robin Renucci, Matthieu Ricard, Yvan Richard, Martin Rieussec-Fournier, Marie-Monique Robin, François Ruffin, Thierry Salomon, Gilles-Eric Séralini, Jo Spiegel, Jacques Testart, Thierry Thévenin, Léonora Tréhel, Aurélie Trouvé, Gilles Vanderpooten, François Veillerette, Patrick Viveret…

Préface de Claude Alphandéry, Christiane Hessel et Edgar Morin

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> Se débarrasser du capitalisme est une question de survie

De Paul Jorion, anthropologue, sociologue.

> Editions Fayard. Mars 2017. 304 pages. 19 euros.

Une machine à concentrer la richesse, laissant une poignée de vainqueurs face à une armée de vaincus : voilà ce qu’est devenu le capitalisme. L’Etat-providence n’aura duré qu’une saison, la révolution technologique en cours réduit le marché de l’emploi.

Le court-termisme règne en maître, la défense de privilèges aussi exorbitants que médiocres bloque toute tentative de sauvetage.

La finance et l’économie pouvaient être réformées au lendemain de l’effondrement de 2008. Rien n’a été fait. Le verdict est sans appel : nous n’apprenons pas de nos erreurs ! Si bien qu’aujourd’hui, se débarrasser du capitalisme est devenu, pour l’humanité, une question de survie.

Paul Jorion propose une analyse sans concession et des pistes d’espoir : oui, la spéculation peut être interdite comme autrefois ; oui, l’Etat-providence doit être inscrit une fois pour toutes dans nos institutions ; oui, un projet européen ressuscité pourrait être le fer de lance d’un véritable redressement ! Seule la volonté fait défaut.

> Le titre du livre de Paul Jorion est inspiré du « Grand Entretien » que l’auteur a accordé à Sciences Critiques le 7 octobre 2016 : « Se débarrasser du capitalisme est une question de survie ». L’entretien y est publié dans son intégralité.

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> Savants, artistes, citoyens : tous créateurs ?

Ouvrage collectif, coordonné par Olivier Leclerc, juriste, directeur de recherche au Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), membre du Centre de Recherches Critiques sur le Droit (CERCRID).

> Editions Science et Bien Commun. Février 2017. 251 pages. 20 euros.

« Amateurs », « citoyens », « profanes », « non-professionnels », « usagers », « public » ont trouvé leur place dans la création artistique et scientifique.

Difficile à mesurer, cette diversification des pratiques créatives est cependant certaine : des amateurs et des amatrices participent à l’élaboration et à la réalisation de projets artistiques dans le domaine de la danse, du théâtre, de la musique, du cinéma. Des non-spécialistes contribuent à la production de connaissances dans des domaines aussi variés que la botanique, l’entomologie, l’astrophysique, quand ils ne sont pas associés à la conception même de projets de recherche.

Comment comprendre et comment analyser cette diffusion des savoirs et pratiques amateurs ? Sommes-nous aujourd’hui tous créateurs et toutes créatrices ? Des limites insurmontables maintiennent-elles les amateurs à distance des créateurs ?

Les contributions réunies dans ce livre, issues d’un colloque tenu au Château de Goutelas en 2015, proposent des regards disciplinaires variés sur les conditions d’une participation réussie des amateurs à la création et sur les obstacles auxquels cette démarche est confrontée. Des entretiens mettent en discussion des expériences concrètes de participation de citoyens et de citoyennes à la création artistique et scientifique.

> L’ouvrage est accessible en ligne ainsi qu’au format PDF.

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> Le monde comme projet Manhattan. Des laboratoires du nucléaire à la guerre généralisée au vivant

De Jean-Marc Royer, diplômé de l’École Nationale d’Aviation Civile et de l’Université Paris-VIII en histoire.

> Editions Le Passager Clandestin. Novembre 2017. 312 pages. 15 euros.

Ce livre est le fruit de plusieurs années de recherche. Il s’ouvre sur une étude historique rigoureusement documentée des origines du nucléaire, le fameux « projet Manhattan » qui débouchera, en août 1945, sur les bombardements d’Hiroshima et de Nagasaki. La thèse centrale de l’auteur est que l’apparition du nucléaire, quasi concomitante d’Auschwitz-Birkenau, est le symptôme d’une rupture fondamentale dans l’histoire du capitalisme et de l’humanité. A partir de là, les complexes scientifique, militaire et industriel sur lesquels elle repose ont en effet orienté de façon décisive les appareils d’État et les industries de l’après-guerre (General Electric, Monsanto, Standard Oil, Westinghouse Electric, Union Carbide…) vers une guerre généralisée au vivant.

Parallèlement, à la faveur de « situations de crises désastreuses » comme celle de Fukushima qu’elle instrumentalise aux dépens de la vie sur Terre, l’idéologie capitaliste s’emploie à rejeter hors du champ de la réflexion toute perspective éthique ou politique. L’auteur convie donc ses lecteurs à un sursaut de l’analyse critique. Il s’agit, sous peine de passer à côté de l’essentiel, d’historiciser et de politiser la mort contre son « érotisation » par les mythifications postmodernes ou transhumanistes. Et de préparer ainsi le démantèlement d’un imaginaire où se sont fossilisés « les secrets de famille de l’Occident capitaliste », secrets dont il est plus qu’urgent de lever le refoulement.

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> Histoire populaire des sciences

De Clifford D. Conner, historien des sciences et professeur à New-York.

> Editions L’Échappée. 2011. 560 pages. 28 euros.

Nous connaissons tous l’histoire des sciences telle que nous l’avons apprise dans les manuels scolaires : comment, grâce à son télescope, Galilée démontra que la Terre n’est pas au centre de l’univers ; comment Newton découvrit l’existence de la gravité en voyant tomber une pomme… Le récit traditionnel de cette épopée attribut à une poignée de grands hommes l’intégralité de ces découvertes.

Pourtant, les sciences sont depuis toujours une œuvre collective. Ce livre raconte l’histoire des savoirs établis par les chausseurs-cueilleurs, les petits paysans, les marins, les mineurs, les forgerons et tant d’autres gens qui devaient assurer leur subsistance au contact quotidien de la nature. La médecine trouve son origine dans la découverte par les peuples préhistoriques des propriétés thérapeutiques des plantes. Les mathématiques doivent leur existence aux topographes, aux marchands, aux comptables et aux mécaniciens.

Au XIXème siècle, l’union du Capital et de la Science rompt cette évolution lente et équilibrée. Elle marque le coup d’envoi de la civilisation de la technoscience, dominée par les experts et obsédée par la puissance, l’efficacité, la rationalisation, l’accumulation et le profit. Comprendre ce basculement nous permet de saisir la nature de la société technologique dans laquelle nous vivons aujourd’hui.

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> La nanosanté. La médecine à l’heure des nanotechnologies

De Mathieu Noury, docteur en sociologie et philosophie, professeur associé à l’Université du Québec à Chicoutimi.

> Editions Liber. Mars 2017. 162 pages. 18 euros.

Après la révolution génétique, la nouvelle révolution en médecine est celle des nanotechnologies. « Médecine du futur », « futur des soins de santé », « révolution médicale », les expressions abondent pour qualifier la nanomédecine. Détecter et traiter les maladies avant l’apparition des premiers symptômes, livrer précisément des médicaments dans les recoins les plus éloignés du corps, diriger des nanoparticules par la lumière dans l’organisme, suivre en continu l’état de santé grâce à des nanocapteurs, régénérer des tissus malades et vieillissants et même améliorer la mémoire ou les performances physiques : ce catalogue de promesses est désormais au coeur de la recherche biomédicale et soulève tant l’intérêt stratégique des gouvernements que la convoitise économique de l’industrie pharmaceutique. La nanomédecine bouscule notre compréhension de la médecine et nous fait entrer de plain-pied dans l’ère de la nanosanté. Cet ouvrage en propose une lecture sociologique.

« Les technologies médicales contemporaines ne cherchent pas seulement à guérir les maladies une fois qu’elles se sont manifestées, mais à intervenir sur les processus vitaux pour les “optimiser”. A la médecine de restauration succède une médecine de l’amélioration. »

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> La silicolonisation du monde. L’irrésistible expansion du libéralisme numérique

D’Eric Sadin, écrivain et philosophe.

> Editions L’Échappée. 2016. 256 pages. 17 euros.

Berceau des technologies numériques (Google, Apple, Facebook, Uber, Netflix, etc.), la Silicon Valley incarne l’insolente réussite industrielle de notre époque. Cette terre des chercheurs d’or, devenue après-guerre le cœur du développement de l’appareil militaire et de l’informatique, est aujourd’hui le lieu d’une frénésie innovatrice qui entend redéfinir de part en part nos existences à des fins privées, tout en déclarant œuvrer au bien de l’humanité.

Mais la Silicon Valley ne renvoie pas seulement à un territoire, c’est aussi et avant tout un esprit, en passe de coloniser le monde. Une colonisation d’un nouveau genre, portée par de nombreux missionnaires (industriels, universités, think tanks…), et par une classe politique qui encourage l’édification de valleys sur les cinq continents, sous la forme d’écosystèmes numériques et d’incubateurs de start-up.

Après avoir retracé un historique de la Silicon Valley, ce livre, à la langue précise et élégante, montre comment un capitalisme d’un nouveau type est en train de s’instituer, un technolibéralisme qui, via les objets connectés et l’intelligence artificielle, entend tirer profit du moindre de nos gestes, inaugurant l’ère d’une « industrie de la vie ».

Au-delà d’un modèle économique, c’est un modèle civilisationnel qui s’instaure, fondé sur l’organisation algorithmique de la société, entraînant le dessaisissement de notre pouvoir de décision. C’est pour cela qu’il est urgent d’opposer à ce mouvement prétendument inexorable d’autres modalités d’existence, pleinement soucieuses du respect de l’intégrité et de la dignité humaines.

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> Remplacer l’humain. Critique de l’automatisation de la société

De Nicholas Carr, auteur, penseur critique du numérique, auteur de Internet rend-il bête ? (Robert Laffont, 2011).

> Editions L’Échappée. 2017. 272 pages. 19 euros.

Les systèmes automatisés ont envahi notre quotidien via les applications pour smartphones, les GPS, les objets connectés, les robots ou drones domestiques − et bientôt les voitures sans conducteur. Chaque jour plus innovantes, ces technologies se proposent de soulager notre esprit, de nous épargner des efforts inutiles et de supprimer frictions et ralentissements dans nos vies.

Censée alléger le travail des ouvriers et accroître les gains de productivité, l’automatisation a été introduite dans les manufactures pendant la révolution industrielle. Grâce à l’irrésistible essor de la robotique et de l’informatique, elle n’a cessé de se développer, d’abord dans l’industrie puis dans tous les domaines : aviation, finance, architecture, design, ressources humaines, médecine, justice, enseignement…

En s’appuyant sur des exemples concrets et des études scientifiques diverses, Nicholas Carr démontre que notre dépendance accrue aux systèmes automatisés n’est pas sans danger. En faisant de moins en moins appel à nos sens, à notre expérience et à nos facultés intellectuelles, nous risquons de perdre notre autonomie, nos savoir-faire et notre pouvoir de décision. C’est pourquoi, il est urgent de nous opposer à l’automatisation intégrale de la société et de remettre en cause le primat de la technologie sur l’humain.

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> Osons rester humain. Les impasses de la toute-puissance

De Geneviève Azam, économiste à l’Université Jean-Jaurès de Toulouse, membre du conseil scientifique d’Attac.

> Editions Les Liens qui libèrent. 2015. 224 pages. 18 euros.

Le déréglement conjoint du monde et de la nature, le surgissement d’événements extrêmes − changement climatique, effondrement de la biodiversité, cumul explosif des inégalités −, sont le signe patent d’une limite de la toute-puissance et d’une défaite de l’idéalisme prométhéen. L’humanité semble ne plus aller de soi.

Que faire face à ces défis immenses ? Cultiver la fragilité inhérente à la condition humaine et aux écosystèmes ou bien tenter absolument de la vaincre ? Tel est l’objet de ce livre qui déconstruit le dualisme issu du monde occidental responsable de l’instrumentalisation de la nature et des humains.

Ce livre est également un cri d’alerte, car la toute-puissance emprunte aujourd’hui de nouvelles voies. La fragilité y devient une erreur de la nature, un défaut de rationalité. Il s’agit de la combler en la transformant en opportunité économique, en augmentant les capacités humaines et en fabriquant une planète « intelligente » qu’il suffit de piloter… Cette fiction, qui accomplirait le précepte néolibéral « il n’y a pas d’alternative », dessine un monde cyborg, fusionnant nature et société que d’aucuns − les courants post-féministes ou post-environnementalistes ainsi que la « neuro-bio-économie » − saluent comme une promesse nouvelle d’émancipation.

Osons rester humain démontre que d’autres chemins sont ouverts et qu’aucune société authentiquement humaine ne pourra se développer sans consentir aux limites qui la fondent.

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> Au péril de l’humain. Les promesses suicidaires des transhumanistes

De Jacques Testart, biologiste, père scientifique du premier bébé-éprouvette français, « critique de science », et Agnès Rousseaux, journaliste, coordinatrice du média indépendant Basta !.

> Seuil. Collection Science Ouverte. Mars 2018. 272 pages. 21 euros.

Fabriquer un être humain supérieur, artificiel, voire immortel, dont les imperfections seraient réparées et les capacités améliorées. Telle est l’ambition du mouvement transhumaniste, qui prévoit le dépassement de l’humanité grâce à la technique et l’avènement prochain d’un « homme augmenté » façonné par les biotechnologies, les nanosciences, la génétique. Avec le risque de voir se développer une sous-humanité de plus en plus dépendante de technologies qui modèleront son corps et son cerveau, ses perceptions et ses relations aux autres. Non pas l’« homme nouveau » des révolutionnaires, mais l’homme-machine du capitalisme.

Bien que le discours officiel, en France, résiste encore à cette idéologie, le projet technoscientifique avance discrètement. Qui impulse ces recherches ? Comment se développent-elles dans les champs médicaux, militaires et sportifs ? Comment les débats démocratiques sont-ils éludés ? Et comment faire face à des évolutions qui ne feront que renforcer les inégalités ? Surtout, quel être humain va naître de ces profondes mutations, de ces expérimentations brutales et hasardeuses sur notre espèce, dont l’Homo sapiens ne sortira pas indemne ?

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> Aventures chez les transhumanistes. Cyborgs, techno-utopistes, hackers et tous ceux qui veulent résoudre le modeste problème de la mort

De Mark O’Connell, journaliste et essayiste irlandais.

> Editions L’Échappée. Avril 2018. 266 pages. 20 euros.

Le transhumanisme peut sembler aussi bien porteur d’un immense espoir que terrifiant. Voire totalement absurde… Son but étant d’« améliorer » la condition humaine − le corps et l’esprit − jusqu’au stade où maladie, vieillesse et mort appartiendront au passé, le futur que prônent ses adeptes relève pour l’instant de la science-fiction. Mais ils sont de plus en plus nombreux, notamment parmi les dirigeants de la Silicon Valley, à croire que l’homme vaincra la mort et à plancher sur la question. Fasciné par ce mouvement en plein essor, Mark O’Connell est parti à leur rencontre.

Au fil de son enquête au long cours, il a fait la connaissance des figures majeures du mouvement et a exploré les lieux où ils élaborent leurs projets : laboratoires ultramodernes, espaces de stockage cryonique, caves dédiées au biohacking… On y croise des tenants du téléchargement de l’esprit, des immortalistes, des programmeurs informatiques redessinant le monde dans leur coin ou encore des développeurs de robots militaires. Aventures chez les transhumanistes dévoile les facettes glaçantes de cette galaxie en pleine expansion.

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> Les êtres vivants ne sont pas des machines

De Bertrand Louart.

> Editions La Lenteur. Février 2018. 320 pages. 16 euros.

« Aujourd’hui, plus que jamais, la conception de l’être vivant comme machine est indissolublement liée au fait que nous vivons dans une société capitaliste et industrielle : elle reflète ce que les instances qui dominent la société voudraient que le vivant soit, afin de pouvoir en faire ce que bon leur semble. »

Dans le sillage des travaux d’André Pichot, Bertrand Louart signe une ambitieuse histoire critique de la biologie moderne. Ce qui unifie cette science est la conception des êtres vivants en tant que machines. Il dévoile les fondements idéologiques de sélection naturelle et de programme génétique. Une attaque percutante contre le darwinisme, d’un point de vue athée et libertaire.

 

 

 

 

 

 

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> Mauvais temps. Anthropocène et numérisation du monde

De Gérard Dubey, sociologue, spécialiste des imaginaires associés aux technologies numériques, et Pierre de Jouvancourt, philosophe, spécialiste des changements épistémologiques et politiques liés au concept d’Anthropocène.

> Editions Dehors. Juin 2018. 144 pages. 15 euros.

Le changement climatique est ce mauvais temps qui veille et gronde sur le théâtre des actions humaines. Face à cet événement, les promesses de transition technologique envahissent les imaginaires en proposant d’innombrables appareillages algorithmiques et autres objets connectés censés répondre à ce qui apparaît précisément comme une dissonance majeure de la flèche du progrès.

Mauvais temps a pour ambition d’analyser ces deux phénomènes en une même suite d’interrogations : comprendre notre situation comme un bouleversement généralisé du temps compris comme temporalités, époque et climat.

Cette réflexion se présente comme une façon d’échapper à ces gardiens du temps que sont les déterminismes aussi bien technologiques, économiques, qu’écologiques. Elle ouvre la question des temporalités dans l’Anthropocène.

Mauvais temps présente notre actualité comme autant de lignes de fuite à explorer, de possibles à revisiter, de partages du sensible à réinventer.

 

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> L’intelligence artificielle ou l’Enjeu du siècle. Anatomie d’un antihumanisme radical

D’Eric Sadin, écrivain, philosophe.

> Editions L’Echappée. Octobre 2018. 304 pages. 18 euros.

C’est l’obsession de l’époque. Entreprises, politiques, chercheurs… ne jurent que par elle, car elle laisse entrevoir des perspectives économiques illimitées ainsi que l’émergence d’un monde partout sécurisé, optimisé et fluidifié. L’objet de cet enivrement, c’est l’intelligence artificielle.

Elle génère pléthore de discours qui occultent sa principale fonction : énoncer la vérité. Elle se dresse comme une puissance habilitée à expertiser le réel de façon plus fiable que nous-mêmes. L’intelligence artificielle est appelée, du haut de son autorité, à imposer sa loi, orientant la conduite des affaires humaines. Désormais, une technologie revêt un « pouvoir injonctif » entraînant l’éradication progressive des principes juridico-politiques qui nous fondent, soit le libre exercice de notre faculté de jugement et d’action.

Chaque énonciation de la vérité vise à générer quantité d’actions tout au long de notre quotidien, faisant émerger une « main invisible automatisée », où le moindre phénomène du réel se trouve analysé en vue d’être monétisé ou orienté à des fins utilitaristes.

Il s’avère impératif de s’opposer à cette offensive antihumaniste et de faire valoir, contre une rationalité normative promettant la perfection supposée en toute chose, des formes de rationalité fondées sur la pluralité des êtres et l’incertitude inhérente à la vie. Tel est l’enjeu politique majeur de notre temps.

Ce livre procède à une anatomie au scalpel de l’intelligence artificielle, de son histoire, de ses caractéristiques, de ses domaines d’application, des intérêts en jeu, et constitue un appel à privilégier des modes d’existence fondées sur de tout autres aspirations.

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> Généalogies et nature du transhumanisme. Etat actuel du débat

Ouvrage collectif, sous la direction de Franck Damour, Stanislas Deprez et David Doat, respectivement historien et philosophes à la chaire Ethique et Transhumanisme de l’Université Catholique de Lille.

> Editions Liber. Octobre 2018. 200 pages. 22 euros.

Depuis plusieurs années déjà, le transhumanisme s’est imposé, tant dans l’espace médiatique que dans le monde universitaire, politique et économique, des deux côtés de l’Atlantique. Si son nom s’accompagne naturellement de l’image futuriste d’un homme « augmenté », « amélioré », grâce aux avancées remarquables des sciences et des techniques, le mouvement embrasse une pluralité de voix, d’acteurs et de réalités depuis sa naissance dans la seconde moitié du vingtième siècle. S’agit-il d’une nouvelle utopie ou d’une dystopie, d’un nouvel idéal civilisationnel ou d’un argument marketing, d’une philosophie ou d’une religiosité séculière, d’un nouveau paradigme anthropologique, d’un mouvement politique ou d’un projet de société, de tout cela à la fois ? Au fond, qu’est-ce que le transhumanisme ?

Le présent ouvrage entend répondre à ces questions. Faisant le pari de l’intelligibilité et du dialogue, il donne la parole à des transhumanistes, à des sympathisants, à des adversaires déclarés et à des analystes qui ne sont ni pour ni contre. Il retrace ainsi l’histoire du mouvement, en confronte les lectures, réfléchit à ses promesses et à leur faisabilité, proposant de la sorte l’état le plus actuel du débat transhumaniste.

> L’un des co-directeurs de l’ouvrage, Franck Damour, était l’invité de notre émission en ligne « Aux origines du transhumanisme », diffusée dans le cadre de notre dossier spécial « Le transhumanisme à l’épreuve du réel ».

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> Leurre et malheur du transhumanisme

D’Olivier Rey, mathématicien, philosophe, chercheur au Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), membre de l’Institut d’Histoire et de Philosophie des Sciences et des Techniques (Université Paris 1-Panthéon Sorbonne).

> Editions Desclée De Brouwer. Octobre 2018. 196 pages. 16,90 euros.

Si c’est au nom d’un futur toujours meilleur que le monde a été transformé en un chantier permanent, nous sommes arrivés à un stade où le rapport entre les bénéfices du « développement » et ses nuisances s’avère de plus en plus défavorable. La perte de confiance dans le progrès doit alors être compensée par une inflation de ce qu’il est censé apporter : plus le monde va mal et menace de s’écrouler, plus il faut abreuver les populations de promesses exorbitantes.

Tel est le rôle du transhumanisme − et peu importe que ce qu’il annonce ne soit pas destiné à se réaliser. Lui accorder trop d’importance, c’est donc se laisser captiver par un leurre. Faudrait-il refuser d’y prêter attention ? Cela n’est pas si simple. Le transhumanisme nous trompe parce qu’il joue en nous sur des ressorts puissants. Se donner une chance de désarmorcer la fascination qu’il exerce et le malheur qu’il propage réclame de mettre au jour ce qui nous rend si vulnérables à ses illusions.

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> Cyberminimalisme. Face au tout-numérique, reconquérir du temps, de la liberté et du bien-être

De Karine Mauvilly, essayiste, co-auteure de Le Désastre de l’école numérique. Plaidoyer pour une école sans écrans (Seuil, 2016).

> Seuil. Février 2019. 240 pages. 18 euros.

Nous ne sommes pas condamnés à crouler sous les datas et à obéir à des logiciels.

La vie numérisée qui s’impose de plus en plus à nous porte gravement atteinte à l’environnement ; des multinationales high-tech pratiquent le vol de données et la captation d’attention ; nos capacités naturelles d’orientation, de mémoire ou d’empathie sont affectées. Face à ce projet de société digitale peu humaniste, le cyberminimalisme propose une reconquête de notre pouvoir de décision en tant qu’humains et citoyens face aux machines.

Au travail, en famille, entre amis, pour nos loisirs ou dans le choix de nos équipements, l’auteure préconise un mode de vie moins numérisé. Le cyberminimalisme n’est pas la cyberabstinence, c’est une reprise de contrôle, tantôt par l’évitement numérique, tantôt par la maîtrise informatique. Préparez-vous à acheter du numérique d’occasion, à adopter des logiciels libres, à profiter de la vie sans poster sur les réseaux sociaux, à agrandir votre zone non numérique. Et comme la liberté se construit dès l’enfance : pas de téléphone portable avant 15 ans !

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> Nos cerveaux resteront-ils humains ?

De Catherine Vidal, neurobiologiste, directrice de recherche honoraire à l’Institut Pasteur de Paris et membre du comité d’Ethique de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm).

> Editions Le Pommier. Janvier 2019. 84 pages. 11 euros.

Depuis la découverte des possibilités de remodelage du cerveau au cours des apprentissages et des expériences vécues, la « plasticité cérébrale » pasionne le monde de la recherche. Il est en effet désormais possible d’agir sur le cerveau pour réparer les handicaps physiques et mentaux.

Mais les espoirs suscités par cette formidale faculté du cerveau à se réinventer sans cesse tendent aujourd’hui à se transformer en fantasmes. Certains vont jusqu’à prédire la fusion entre cerveau et ordinateur, entre intelligence humaine et artificielle… Quel crédit accorder à ces visions techno-futuristes du transhumanisme ? Qu’est-ce qui est, aujourd’hui, réellement faisable ? Et demain ?

Il ne s’agit pas seulement de faire le point sur les progrès des neurosciences, mais aussi de réfléchir à ce qui est souhaitable pour que nous, humains, préservions notre liberté d’agir et de penser.

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> Technocritiques. Du refus des machines à la contestation des technosciences

De François Jarrige, historien, maître de conférences à l’Université de Bourgogne (Centre Georges-Chevrier).

> La Découverte. 2014. 420 pages. 28 euros.

Les techniques promettent abondance et bonheur ; elles définissent la condition humaine d’aujourd’hui. Pourquoi les contester, et à quoi bon ? Les discours technocritiques ne masquent-ils pas des peurs irrationnelles, un conservatisme suranné, voire un propos réactionnaire ? Pourtant, depuis que les sociétés humaines sont entrées dans la spirale de l’industrialisation, des individus et des groupes très divers ont dénoncé les techniques de leur temps et agi pour en enrayer les effets.

Contre l’immense condescendance de la postérité, Technocritiques est un ouvrage qui prend au sérieux ces discours et ces luttes. Depuis deux siècles, les technocritiques sont foisonnantes et multiformes, elles émanent des philosophes et des romanciers comme des artisans et des ouvriers. Elles se retrouvent en Europe comme dans le reste du monde et nourrissent sans cesse des pratiques alternatives. Toute une tradition de combat et de pensée originale et méconnue s’est ainsi constituée.

Ce livre d’histoire au présent tente de leur redonner vie, tout en pointant les impasses des choix politiques mortifères portés par la foi en une « croissance » aveugle. Et, en filigrane, il montre comment s’est imposé le grand récit chargé de donner sens à la multitude des objets et artefacts qui saturent nos existences.

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> Le modernisme réactionnaire. Haine de la raison et culte de la technologie aux sources du nazisme

De Jeffrey Herf, historien, professeur émérite à l’Université du Maryland (Etats-Unis).

> Editions L’Echappée. 2018. 320 pages. 22 euros.

Le nazisme est trop souvent présenté comme un mouvement profondément antimoderne, obsédé par un passé mythique et exaltant la communauté du sang et de la tradition culturelle. Dans ce livre, qui a fait date par son approche radicalement nouvelle, Jeffrey Herf montre au contraire qu’il a voué un culte délirant à la technologie la plus avancée.

Pour ce faire, le grand historien américain s’est livré à une enquête approfondie sur les origines idéologiques du IIIème Reich, mettant en lumière une nébuleuse originale d’intellectuels, dont plusieurs ont marqué l’histoire des idées, comme Oswald Spengler, Ernst Jünger, Werner Sombart ou Carl Schmitt. Le point commun de ces « modernistes réactionnaires » est d’avoir fusionné certaines dimensions de la société industrielle − son mode de production et sa technologie, la rationalité instrumentale avec la culture du nationalisme allemand, caractérisée par sa haine de la raison et de la démocratie.

Les conclusions qui se dégagent de cette passionnante enquête, qui a renouvelé l’interprétation du phénomène nazi, et jusqu’ici étonnamment restée inédite en français, sont les suivantes : d’une part, la modernité n’est pas un phénomène monolithique, qu’il faudrait accepter ou rejeter en bloc ; d’autre part, l’adhésion à la modernité technique n’est pas en soi un gage d’émancipation.

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> Le bonheur était pour demain. Les rêveries d’un ingénieur solitaire

De Philippe Bihouix, ingénieur centralien, auteur de L’Âge des low tech. Vers une civilisation techniquement soutenable (Seuil, 2014).

> Seuil. Avril 2019. 384 pages. 19 euros.

Pendant des siècles, les chantres du progrès par la technique et la science appliquée ont promis à l’humanité le bonheur pour demain, ou au plus tard après-demain. L’emballement numérique, la perspective de technologies « révolutionnaires » ou « disruptives », les limites sans cesse repoussées, les annonces tonitruantes de milliardaires high-tech ont redonné un nouveau souffle aux promesses d’un monde technologique meilleur, d’abondance et de bonheur pour tous, de l’immortalité à la conquête spatiale, en passant par les énergies « propres » et la capacité à « réparer » une planète bien fatiguée.

Non content de tailler en pièces ce « technosolutionnisme » béat, du passé comme du présent, ignorant les contraintes du monde physique et de ses ressources limitées, l’auteur questionne aussi les espoirs de changement par de nouveaux momdèles économiques plus « circulaires » ou le pouvoir des petits gestes et des « consomm’acteurs », face aux forces en présence et à l’inertie du système.

Une fois balayées les promesses mystificatrices ou simplement naïves, rien n’empêche de rêver, mais les pieds sur terre : nous pouvons mettre en oeuvre, dès maintenant et à toutes les échelles, une foule de mesures salutaires.

Et si, finalement, le bonheur était bien pour demain ?

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> La perfection de la technique

De Friedrich Georg Jünger (1898-1977), écrivain, essayiste, poète allemand.

> Editions Allia. Novembre 2018. 400 pages. 22 euros.

La perfection de la technique, c’est la rationalité absolue des procédés qui ont mécanisé et automatisé le travail depuis le début de la Révolution industrielle. Une efficacité implacable, appliquée à la société humaine tout entière. Reliées au réseau à l’échelle planétaire, les machines dominent l’activité du travailleur, désormais détaché de tout ancrage local. En favorisant une pensée uniquement fondée sur une partie du processus, en envisageant les ressources naturelles sur lesquelles elle s’appuie comme une manne inépuisable, la technique pourrait bien précipiter elle-même sa propre fin.

Dans cet essai visionnaire, inédit en français, Friedrich Georg Jünger dénonce les illusions que suscite la technique moderne, ses promesses d’un accroissement de la richesse et du temps libre. Après la destruction de la composition typographique du livre dans un bombardement allié en 1942, une première édition a pu voir le jour en 1944, rapidement réduite en cendres par une attaque aérienne. La Perfection de la technique paraît enfin, en deux livres séparés, en 1946 et 1949, avant de connaître de multiples éditions en un seul volume par la suite.

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> Technopoly. Comment la technologie détruit la culture

De Neil Postman (1931-2003), critique culturel américain, théoricien des médias, auteur notamment de Se distraire à en mourir (Pluriel, 2011).

> Editions L’Echappée. Septembre 2019. 224 pages. 18 euros.

Nous sommes entrés dans l’ère de la Technopoly. Soit une société dans laquelle la culture est entièrement soumise aux impératifs technologiques. Tout doit y être mesuré, évalué avec le plus haut degré de précision, converti sous forme de données quantifiables et objectives, pour permettre à des machines ou à des experts d’assurer, pour notre plus grand bonheur, la gestion de nos vies.

Bien que l’information n’ait jamais été aussi facile d’accès et présente en telle quantité, nous sommes désemparés, incapables d’appréhender un monde devenu d’une grand complexité. D’autant que les institutions sociales (l’école, la famille, les organisations politiques…) et les valeurs au fondement de la culture humaniste − qui structuraient jusqu’alors nos existences, tout en favorisant le développement de notre autonomie et de notre faculté de jugement − ont rendu les armes face au monopole de la technique.

Les réflexions développées dans ce livre retentissant de Neil Postman, publié pour la première fois aux Etats-Unis en 1992, n’ont rien perdu de leur actualité. Bien au contraire, elles révèlent avec une rare lucidité les fondements des mutations profondes qui n’ont fait que s’accélérer depuis. En remontant aux origines de la science moderne et de l’idéologie du progrès, l’auteur dresse un constat sans appel : la soumission de la culture à la technique menace à terme de détruire les sources vitales de notre humanité.

Traduction de l’ouvrage original par un collectif de membres de Technologos.

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> Et le monde devint silencieux. Comment l’agrochimie a détruit les insectes

De Stéphane Foucart, journaliste scientifique au Monde.

> Seuil. Août 2019. 336 pages. 20 euros.

Comment l’industrie des pesticides a orchestré le plus grand désastre écologique du début du XXIème siècle.

Souvenez-vous de la route des vacances. Il y a seulement vingt-cinq ans, il était impossible de traverser le pays en voiture sans s’arrêter pour éclaircir le pare-brise, où des myriades d’insectes s’écrasaient. Cette vie bourdonnante s’est comme évaporée.

Depuis le début des années 2000, les géants de l’agrochimie ont installé l’idée que la disparition des insectes était une énigme. Cette conjonction mystérieuse serait due à de multiples facteurs, tous mis sur un pied d’égalité : destruction des habitats, maladies, espèces invasives, éclairage nocturne, mauvaises pratiques apicoles, changement climatique…

En réalité, la cause dominante de ce désastre est l’usage massif des pesticides néonicotinoïdes. Depuis leur introduction dans les années 1990, les trois quarts de la quantité d’insectes volants ont disparu des campagnes d’Europe occidentale.

Ce livre montre comment les firmes agrochimiques ont rendu possible cette catastrophe, en truquant le débat public par l’instrumentalisation de la science, de la réglementation et de l’expertise. Voici le récit complet et précis de l’enchaînement de ces manipulations, les raisons de ce scandale.

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> La tyrannie des algorithmes

De Miguel Benasayag, philosophe, psychanalyste, chercheur en épistémologie.

> Editions Textuel. Octobre 2019. 132 pages. 17 euros.

Miguel Benasayag nous alerte sur le risque majeur que font peser les algorithmes sur nos démocraties : les big data sont en train de décider des orientations du monde et c’est au quotidien que la vie collective est insidieusement « prise en charge » par les machines.

En conséquence de l’effondrement au XXème siècle du mythe fondateur qui voyait en la raison humaine le garant du bien, les élites ont délégué le pouvoir de décision aux robots et calculateurs. C’est cette servitude, signe de notre entrée dans une ère post-démocratique, que dénonce Miguel Benasayag.

Loin du clivage entre technophiles et technophobes, il démontre ici comment la résistance à la colonisation de l’humain par la machine doit passer par une recherche d’hybridation.

Il ne s’agit ni de refuser l’intelligence artificielle, ni de se laisser dominer par elle, mais d’appréhender les conséquences politiques et démocratiques de cette nouvelle forme de domination.

Un plaidoyer pour repenser la conflictualité nécessaire à la démocratie, au carrefour de la science, de la philosophie et de la politique.

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> Technopouvoir. Dépolitiser pour mieux régner

De Diana Filippova, auteure, cheffe d’entreprise, cofondatrice du mouvement citoyen Place publique.

> Editions Les Liens qui libèrent. Novembre 2019. 288 pages. 21 euros.

Les technologies ne nous font plus rêver. Pan par pan, la mythologie du progrès s’effondre sous nos yeux. Le monde numérique se révèle chaque jour plus matériel, injuste et polluant. Internet lui-même ressemble à une vaste benne où nous venons déposer nos espoirs déçus.

Les injonctions à reprendre le pouvoir tombent à l’eau : c’est que nous avons perdu la main. Et si les politiques des technologies n’avaient pas pour but de nous émanciper, mais au contraire de nous empêcher d’exercer notre pouvoir d’agir ? Et si les libertés dont elles font mine de nous gratifier n’étaient qu’un trompe-l’oeil pour mieux nier ce qui fait de nous des animaux politiques, nier notre capacité à critiquer, à contester, à nous rebeller ?

Diana Filippova propose de déplacer notre regard et d’aborder les techniques comme un vivier de technologies de pouvoir − le technopouvoir. Son mobile : gouverner des êtres qui placent les droits et libertés individuels au-dessus de tout. Sa visée : servir les intérêts de certains aux dépens de nous tous. C’est ainsi qu’une nouvelle frontière électronique nous sépare les uns des autres, nous poussant à devenir des sujets parfaitement prévisibles, flexibles et gouvernables. C’est ainsi que le pouvoir échappe chaque jour davantage au royaume du politique.

Ce livre est d’utilité publique : en disséquant la genèse et les stratégies du technopouvoir, il entreprend d’ouvrir des boîtes noires − par effraction, s’il le faut. Alors, face à un art de la guerre en temps de paix, nous pourrons regagner une prise sur la marche de nos sociétés. Alors, nous pourrons retrouver l’essence de nos démocraties, et peut-être réapprendre à faire de la politique.

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> Contre l’alternumérisme

De Julia Laïnae, membre de l’association Les Décâblés, étudiante en philosophie et apprentie herboriste, et Nicolas Alep, membre de l’association Technologos, informaticien en rupture de ban.

> Editions La Lenteur. Janvier 2020. 144 pages. 10 euros.

A mesure que l’informatisation galopante de la société se révèle une source infinie de nuisances, une myriade d’acteurs nous serinent qu’un autre numérique (r)est(e) possible : plus humain, plus écologique, plus transparent, plus coopératif.

Les Gafam n’ont qu’à bien se tenir, les alternuméristes se font fort de convertir la méga-machine à profits qu’est Internet en outil convivial au service de la démocratie, du sauvetage de la planète, du bien-être de tous.

Dans ce bref essai mordant, Julia Laïnae et Nicolas Alep taillent un costume mérité aux bureacrates verts de l’Ademe et du Shift Project, au « filousophe » Bernard Stiegler, aux tenants du logiciel libre, de l’open data et de la civic tech.

Ils réaffirment une position encore insoutenable pour bon nombre de nos contemporains : défendre la vie sur Terre et la liberté humaine implique nécessairement de désinformatiser le monde.

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> Vérités citoyennes. Les sciences contre la post-vérité

Ouvrage collectif, dirigé par Maryvonne Holzem, linguiste et membre de l’association Sciences Citoyennes

> Editions du Croquant. 2019. 174 pages. 12 euros.

Les informations pléthoriques et dérégulées découragent toute controverse et dévalorisent les notions mêmes de vérité et de connaissance objective de notre monde commun.

Cette connaissance reste d’autant plus indispensable que nous nous trouvons à l’échelle planétaire face à de multiples dangers politiques, sanitaires et environnementaux, notamment une évolution climatique aussi complexe qu’imprévisible.

Or, du lobbying généralisé qui fabrique du mensonge à dessein pour semer le doute à la « foutaise » qui prétend n’importe quoi (Trump ne ment pas, il se fout de la vérité), l’ère de la post-vérité revêt de multiples facettes détaillées dans cet ouvrage.

Né d’une table-ronde organisée par l’association Sciences Citoyennes, ce livre dépasse un cadre disciplinaire strict et bénéficie d’une pluralité de points de vue. Il dépasse le stade des constats pour éclairer le phénomène de la prétendue « post-vérité » dans un domaine où l’idée de vérité partagée est essentielle : celui des sciences.

Il explore plusieurs pistes pour démocratiser la connaissance scientifique et la pensée critique à l’heure où la précarisation de l’information redouble la précarité économique de bon nombre de citoyens qui exigent à juste titre de n’être plus des intermittents de la vie politique.

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> A la trace. Enquête sur les nouveaux territoires de la surveillance

D’Olivier Tesquet, journaliste à Télérama.

> Editions Premier Parallèle. Janvier 2020. 256 pages. 18 euros.

« A l’heure où la reconnaissance faciale investit nos visages, où les assistants vocaux intelligents s’invitent dans nos salons, où Instagram recompose nos rapports sociaux, est-il encore possible de se tenir à l’abri des regards ?

Des caméras intelligentes du Xinjiang à nos profils Facebook, les dispositifs de surveillance s’éparpillent jusqu’à donner l’illusion de disparaître. Parce qu’ils sont partout, nous ne les voyons plus nulle part.

En agents consentants de notre enfermement, nous sommes invtés à transformer chacune de nos expériences en signal que ces dispositifs pourront exploiter.

Depuis dix ans, j’essaie de cartographier minutieusement les nouveaux territoires de la surveillance, que j’observe tout en y résidant. En décrivant sans les fantasmer les mécanismes de ces systèmes opaques, ce livre est un manuel à l’usage de ceux, trop nombreux, qui pensent n’avoir rien à cacher. »

Olivier Tesquet

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> On achève bien les enfants. Ecrans et barbarie numérique

De Fabien Lebrun, docteur en sociologie et membre du comité de rédaction de la revue Illusio.

> Editions Le Bord de l’eau. Collection Altérité critique. Octobre 2020. 178 pages. 16 euros.

Maintenant que certains dangers des écrans pour les enfants sont connus, d’autres restent encore à exposer. Aussi, est-il nécessaire d’élargir la critique de la consommation à une critique de la production pour saisir la destruction totale et inouïe des enfants par les écrans. Des enfants surexposés des pays riches aux enfants exploités et massacrés du reste du monde (spécialement au Congo), le désastre environnemental et humain est effarant, dont les GAFA [Google, Apple, Facebook et Amazon, NDLR] et consorts ont une lourde responsabilité. Il est urgent de refuser collectivement les écrans du capitalisme afin de préserver l’enfance et les enfants.

L’auteur présente une critique inédite des écrans de façon systémique et transdisciplinaire, de leur production par les enfants eux-mêmes, notamment en Afrique.

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> Merci de changer de métier. Lettres aux humains qui robotisent le monde

De Célia Izoard, journaliste, traductrice, autrice et rédactrice au sein de la revue Z.

> Editions de la dernière lettre. Septembre 2020. 136 pages. 9 euros.

« Je vous écris parce que c’est de nos vies à tous qu’il s’agit, de la manière dont on voudrait vivre demain. Un projet comme celui des véhicules autonomes n’a rien d’un détail. On est obligé de se demander quel rapport il entretient avec la situation tragique qui est maintenant la nôtre, l’emballement climatique, l’extinction massive des espèces, la raréfaction de l’eau potable. On est obligé de se demander ce que signifie l’expulsion immédiate de millions de professionnels de la conduite, destinés à une hypothétique reconversion dans les métiers du numérique. Les véhicules autonomes sur lesquels vous travaillez pourraient-ils améliorer la situation ? Ce n’est pas un petit enjeu, qu’on peut balayer avec des formules toutes faites sur les “mobilités durables et connectées”. »

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> Contre la résilience. A Fukushima et ailleurs

De Thierry Ribault, chercheur en Sciences sociales au Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS).

> Editions L’Echappée. Mars 2021. 368 pages. 22 euros.

Funeste chimère promue au rang de technique thérapeutique face aux désastres en cours et à venir, la résilience érige leurs victimes en cogestionnaires de la dévastation. Ses prescripteurs en appellent même à une catastrophe dont les dégâts nourrissent notre aptitude à les dépasser. C’est pourquoi, désormais, dernier obstacle à l’accommodation intégrale, l’« élément humain » encombre. Tout concourt à le transformer en une matière malléable, capable de « rebondir » à chaque embûche, de faire de sa destruction une source de reconstruction et de son malheur l’origine de son bonheur, l’assujettissant ainsi à sa condition de survivant.

A la fois idéologie de l’adaptation et technologie du consentement à la réalité existante, aussi désastreuse soit-elle, la résilience constitue l’une des nombreuses impostures solutionnistes de notre époque. Cet essai, fruit d’un travail théorique et d’une enquête approfondie menés durant les dix années qui ont suivi l’accident nucléaire de Fukushima, entend prendre part à sa critique.

La résilience est despotique car elle contribue à la falsification du monde en se nourrissant d’une ignorance organisée. Elle prétend faire de la perte une voie vers de nouvelles formes de vie insufflées par la raison catastrophique. Elle relève d’un mode de gouvernement par la peur de la peur, exhortant à faire du malheur un mérite. Autant d’impasses et de dangers appelant à être, partout et toujours, intraitablement contre elle.

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> Tchernobyl par la preuve. Vivre avec le désastre et après

De Kate Brown, historienne, spécialiste d’histoire environnementale, professeur de science, technologie et société au Massachusetts Institute of Technology.

> Actes Sud. Collection Questions de société. Mars 2021. 528 pages. 25 euros.

En 2011, “quand la centrale de Fukushima a été frappée de plein fouet par un tsunami, les dirigeants japonais ont réagi de manière étrangement similaire à celle des leaders soviétiques en 1986. Ils ont massivement sous-estimé l’ampleur de la catastrophe − la fusion de trois réacteurs −, ils ont envoyé des pompiers sans équipement de protection dans des champs de radioactivité très élevés et n’ont intentionnellement pas informé la population des niveau de radiation”. Puis ils ont dissimulé l’ampleur de la catastrophe, comme les dirigeants soviétiques l’ont fait pendant quelques années.

Kate Brown est la première historienne occidentale à avoir travaillé dans les archives du ministère ukrainien de la Santé. Après dix ans de fouilles − elle a obtenu la déclassification de nombreux dossiers −, d’entretiens et d’enquête de terrain en Russie, en Ukraine (jusque dans la Zone d’exclusion) et en Biélorussie, elle nous donne à voir l’étendue du désastre, mais aussi les actions entreprises pour dissimuler la vérité et convaincre la communauté internationale et l’opinion publique de l’innocuité des retombées radioactives. Car les efforts déployés pour dénaturer l’histoire ne s’arrêtent pas aux frontières de l’URSS : plusieurs Etats occidentaux, des agences de l’ONU, des diplomates internationaux et des scientifiques associés à l’industrie nucléaire ont éludé, voire nié l’existence d’une catastrophe sanitaire de grande échelle.

Cette enquête révèle ou confirme les mensonges et les collusions, mais relate aussi le quotidien des survivants. Elle met en lumière les conséquences irréversibles de la radioactivité artificielle sur l’ensemble du vivant, la spécificité des faibles doses accumulées, et nous confronte, jusqu’à la sidération, à ce que nous ont légué des décennies d’accidents et d’essais nucléaires en tout genre. Quoi que l’avenir nous réserve, nous ne pouvons plus continuer à faire l’économie d’un honnête et véritable guide de survie − en cas de nouveau désastre.

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> Les gardiens de la raison. Enquête sur la désinformation scientifique

De Stéphane Foucart, Stéphane Horel et Sylvain Laurens, respectivement journalistes au Monde et sociologue, maître de conférences à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS).

> La Découverte. Septembre 2020. 368 pages. 22 euros.

Les années 2000 ont vu déferler les mensonges des industriels du tabac, des énergies fossiles ou des pesticides et leurs études commanditées dissimulant la dangerosité de leurs produits. Explorant les nouvelles frontières du lobbying, cette enquête dévoile les stratégies de manipulation qu’emploient désormais ces « marchands de doute » pour promouvoir leur « bonne » science et s’emparer du marché de l’information scientifique.

Leur cible privilégiée n’est plus seulement le ministre ou le haut fonctionnaire. Aux aguets sur les réseau sociaux, des agences spécialisées visent le professeur de biologie de collège, blogueur et passeur de science, le citoyen ordinaire, le youtubeur, le micro-influenceur. Instrumentalisés pour propager des contenus dégriffés, les amateurs de science sont transformés en relais zélés des messages de l’industrie et en viennent à se considérer comme des gardiens de la raison.

Parmi ces fact-checkers, vérificateurs d’informations autoproclamés, peu savent qu’ils amplifient des éléments de langage concoctés par des officines de relations publiques. Une poignée d’intellectuels et de scientifiques, en revanche, participe sciemment à la réactualisation, autour de la science, de tout le crédo conservateur. Un projet politique volontiers financé par l’argent des industriels libertariens, et qui porte la marque de leur idéologie anti-environnementaliste et antiféministe.

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> 2084. Pourquoi l’Etat joue avec votre santé

De Pierre Meneton, chercheur à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm).

> HumenSciences. Octobre 2021. 132 pages. 14,90 euros.

On n’a jamais autant parlé de sécurité et de santé. Et si ces prétendues priorités étaient en fait des prétextes opportuns que l’Etat utilise pour nous contrôler, afin d’assurer sa pérennité et celle du système socioéconomique actuel ?

Dans une démonstration remarquablement documentée, l’auteur, chercheur en santé publique, montre qu’en réalité presque rien n’est fait pour lutter contre les principales causes de maladies et de décès qui touchent la population.

Au fil des pages, la vraie nature de l’Etat se révèle : une organisation totalitaire qui forme des individus incultes, hyperspécialisés, mystifiés, asservis, dépossédés de leur vie.

Ce livre appelle à une prise de conscience, car il ne tient qu’à nous de construire une société radicalement différente. Réveillez l’homme ou la femme libre qui dort en vous !

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> La guerre de l’attention. Comment ne pas la perdre

De Yves Marry et Florent Souillot, co-fondateurs de l’association Lève les yeux, collectif pour la reconquête de l’attention.

> L’Echappée. 2022. 256 pages. 18 euros.

C’est une guerre qui nous fait passer l’essentiel de notre temps devant un écran. Une guerre dont nous sommes à la fois les victimes et les agents quand nous réagissons sur Twitter, quand nous notons un chauffeur sur Uber, quand nous swipons sur Tinder…

Une guerre qui fait de nombreux dommages, en premier lieu chez les plus jeunes : obésité, troubles du sommeil et de la concentration, isolement… sans compter la mise en danger du lien social et du débat démocratique, et l’accélération de la catastrophe écologique. Une guerre que se livrent les plus grandes entreprises pour capter notre temps de cerveau. Cette guerre, c’est celle de l’attention.

Au fondement de notre liberté et de notre bien-être, l’attention est une ressource rare et précieuse. Elle pourrait disparaître si son exploitation, immense gisement de profits, n’est pas limitée. Pour cela, les manuels de « bon usage » du numérique ne suffiront pas. Refusant les fausses promesses du « techno-solutionnisme vert », ce livre est une arme pour mener la reconquête collective de notre attention. Nourri par un travail de terrain, il propose une plongée dans les rouages de l’économie de l’attention ainsi que des propositions politiques concrètes. Ou comment faire de la déconnexion un pilier de la transition écologique à venir, au service d’une société conviviale et décroissante.