« La science est une chose trop importante pour être laissée entre les mains des seuls savants. » (Carl E. Sagan)

Dior veut «inverser» le vieillissement

La célèbre marque de luxe détenue par le milliardaire Bernard Arnault se lance dans des recherches d’inspiration transhumaniste. Son objectif ? Comprendre les « causes profondes » du vieillissement de la peau pour commercialiser des produits qui « inversent les effets du temps ».

« Faire triompher la science sur le temps ». C’est ce que promet désormais, ni plus ni moins, la marque de luxe Dior, qui a récemment annoncé investir dans les recherches sur la longévité, en s’engageant dans le « reverse aging », l’inversion du vieillissement. « Les découvertes récentes dans le domaine de la longévité sont parmi les plus rapides et les plus prometteuses de la science aujourd’hui », croit savoir la marque, propriété du groupe LVMH, qui se dit « animée par un esprit avant-gardiste ». Désireuse de se présenter dorénavant comme une « Maison de la Science » (et non plus uniquement comme une « Maison de la Beauté »), elle affirme « effectuer ainsi une entrée audacieuse dans une aventure scientifique inédite et déterminante ».

 

L’épopée humaine la plus vertigineuse depuis la conquête de l’espace.

 

La communication du célèbre fabricant français de cosmétiques, qui multiple les promesses et affiche ses croyances à travers son entité « Dior Science », n’a rien à envier aux discours transhumanistes. Dior « croit » que l’inversion du vieillissement est « l’épopée humaine la plus vertigineuse depuis la conquête de l’espace ». « Nous croyons [sic] que nous sommes à l’aube d’une révolution scientifique historique », avance la marque, qui n’hésite pas à parler de « conquête du temps » permise grâce aux développements technoscientifiques. « Nous croyons [re-sic] que le mariage de la nature et de la science nous ouvre les portes d’un autre futur », tient-elle encore à faire savoir.

 

« DÉTERMINÉ À REPOUSSER
LES LIMITES DE LA SCIENCE »

 

Si les industriels recourent depuis longtemps aux arguments de type scientifique pour promouvoir et commercialiser leurs produits, Dior va ici plus loin en désirant repousser les limites mêmes du vieillissement. Pour ce faire, la filiale du leader mondial du luxe a mis en place « le premier conseil scientifique international » sur l’inversion du vieillissement de la peau. Dix-huit « des plus grands experts internationaux » le composent – dont Nancy Etcoff, psychologue et chercheuse à la Harvard Medical School ; Nicola Neretti, spécialiste de biologie moléculaire et cellulaire à la Brown University ; ou encore David Furman, professeur à l’Institut Buck et spécialiste de l’intelligence artificielle appliquée à la santé. Ils doivent aiguiller le travail des 600 ingénieurs du groupe LVMH et communiquer directement au grand public les avancées de leurs travaux.

 

le premier conseil scientifique international sur l’inversion du vieillissement de la peau.

 

L’objectif « scientifique » de Dior ? « Ne plus agir uniquement sur les conséquences visibles du vieillissement de la peau mais bien sur les causes profondes de celui-ci. » Plus exactement, il est de « faire avancer la recherche » sur les 12 marqueurs-clés du vieillissement cutané identifiés à ce jour : la sénescence cellulaire, l’épuisement des cellules souches, l’attrition des télomères des chromosomes, etc. Il s’agit ainsi pour le fabricant de cosmétiques de « retarder, voire d’inverser les effets du temps ». Dior se dit « déterminé » à « repousser les limites de la science », tout en reconnaissant que « de nombreux éléments restent à corroborer et à tester lors d’essais cliniques », singeant par là les procédures de l’industrie pharmaceutique.

 

UN MARCHÉ ESTIMÉ À 120 MILLIARDS DE DOLLARS EN 2030

 

Avant de se lancer dans le secteur – prometteur – du « vieillissement inversé », la marque a sondé 5 000 femmes de 18 à 80 ans, en France, aux Etats-Unis, en Corée, au Japon et en Chine. Environ 80 % d’entre elles ont émis le souhait d’être plus jeunes ou, à défaut, de paraître plus jeunes. Un sentiment, celui de la peur de vieillir, que compte aujourd’hui exploiter le fabricant de cosmétiques. Selon des analystes, le marché mondial de l’« anti-vieillissement » (ou « anti-âge ») s’élèvera à 120 milliards de dollars en 2030, avec un taux de croissance annuel moyen de 7,5 %. De quoi voir venir avec le temps…

Anthony Laurent, rédacteur en chef / Sciences Critiques.

 

 

2 Commentaires

  1. Vous êtes sérieusement naifs si vous pensez qu’il y a quelque chose de réel derrière. C’est du bullshit marketing. Même le transhumaniste que je suis le vois bien.

  2. Culture du paraître – et puis qui a décidé que vieillir ne doit surtout pas être désiré ? Faire jeune mais ne pas pouvoir venir à bout de ses arthrites pourrait laisser échapper quelques moqueries. Avant remplacement contre quelques prothèses connectées v3.0 en zamak et dopée à l’«IA».
    https://www.cairn.info/revue-cites-2016-1-page-33.htm
    Dior participe sans le vouloir au triomphe de Marx : l’Homme est bel et bien une marchandise comme une autre. N’oubliez pas votre crème de maintenance, mesdames, la Mort se fout encore bien de votre minois.
    Et l’Éternité pas moins. Le business, votre divinité, non.

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