«Bifurquons ! Désertons !» Revivez la rencontre-débat du 25 avril dernier à Paris
– Lola Keraron, ingénieure « agro-déserteuse » (diplômée d’AgroParisTech), membre du collectif « Des Agros qui bifurquent ».
« La science est une chose trop importante pour être laissée entre les mains des seuls savants. » (Carl E. Sagan)
En 2022, beaucoup d’encre a coulé au sujet de la désertion des plus diplômé·es, souvent dans la confusion et la superficialité. Dans un contexte de mouvement social d’ampleur – violemment réprimé – contre une réforme des retraites qui considère les êtres comme des ressources productivistes, nous voulons préciser pourquoi nous avons choisi de déserter, dans l’idée de donner des perspectives et d’élargir le front de la contestation.
Épidémiologiste et docteur en physique, Laurent Toubiana est chercheur à l’Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (Inserm), où il dirige une équipe de recherche au sein du Laboratoire d’Informatique Médicale et d’Ingénierie des Connaissances. Il est par ailleurs le fondateur et le directeur de l’Institut de Recherche pour la Valorisation des Données de Santé, qui propose d’analyser les données médicales relatives aux épidémies. Pour lui, l’épidémie de Covid-19 est loin d’avoir été la plus grave dans l’histoire des sociétés modernes occidentales. Trois questions à un scientifique critique.
La recherche en génie génétique explose ces dernières années. L’un de ses derniers avatars, encore largement méconnu – le forçage génétique –, passionne et inquiète par ses potentielles répercutions sociales, biologiques, militaires et commerciales. Dans le premier rapport international sur le forçage génétique, trois groupes de scientifiques dressent un état des lieux de cette technologie. « Le forçage génétique impose une attention urgente », note leur rapport, qui, en conclusion, ouvre des pistes pour s’opposer à son développement.
Dans un avis rendu public fin 2022 et remis au ministre de la Santé, François Braun, le Comité Consultatif National d’Ethique (CCNE) tire les « leçons de la crise sanitaire et hospitalière ». Selon le CCNE, l’épidémie de Covid-19 a révélé une « crise morale » au sein de l’hôpital public et la souffrance des professionnels de santé. Parmi les maux qui touchent le système de santé français : la « technicisation » accrue de la pratique soignante, qui privilégie les actes techniques au détriment de la relation de soin. Trois questions à Régis Aubry, chef du service de soins palliatifs du centre hospitalier universitaire (CHU) de Besançon et rapporteur de l’avis du CCNE.
D’où vient le phénomène complotiste contemporain ? Vitupéré par certains observateurs, qui attribuent son existence essentiellement à des dysfonctionnements cognitifs individuels – voire à une maladie mentale –, il est, au contraire, considéré par d’autres comme un phénomène avant tout social, révélateur d’une sorte de « désenchantement du monde ». Trois questions à Richard-Emmanuel Eastes, docteur en sciences de l’éducation et en philosophie, pour qui « les complotistes », terme de nos jours essentialisé, sont « souvent ceux qui expriment le plus fort esprit critique ».
A-t-on vraiment besoin d’ingénieurs ? Ces derniers répondent-ils aux besoins fondamentaux de la société tout entière ou à ceux, particuliers, du système capitaliste et productiviste ? Les ingénieurs œuvrent-ils à la défense des biens communs et de l’intérêt général ou à celle des intérêts privés ? Quels pourraient être aujourd’hui leurs responsabilités et leur rôle ? Et peut-on être ingénieur et décroissant ? C’est à toutes ces questions – et à bien d’autres – que répond Vincent Liegey, ingénieur de formation, chercheur interdisciplinaire, et l’un des porte-paroles les plus en vue du mouvement de la décroissance.
La fête (de la science) est finie. En France, le tout jeune mouvement de scientifiques engagés Scientist Rebellion (« Scientifiques en rébellion ») a profité de la grand-messe scientiste annuelle qu’est la Fête de la science pour mener des conférences-occupations ciblant « des lieux dans lesquels se décident des projets climaticides ou écocides ». Des mobilisations qui (in)augurent d’autres actions dans les semaines et les mois à venir, notamment en Allemagne. Trois questions à Manua, coordinateur de Scientist Rebellion pour la France.
Fervent promoteur des technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement, Jean-Michel Blanquer, qui a réussi l’exploit de demeurer ministre de l’Education nationale durant tout le premier quinquennat d’Emmanuel Macron, a contribué à la prise de pouvoir rampante des géants du numérique et d’Internet – au premier rang desquels les GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft) – et des industriels de la tech sur la politique éducative nationale. Cette technologisation de l’éducation cible en premier lieu le travail quotidien des personnels, enseignants et administratifs, mais aussi désormais les cerveaux des élèves, nouveaux « cobayes » de la neuropédagogie.
« Ce n’est ni la politique, ni l’économie, ni la finance, ni l’idéologie, ni les valeurs éthiques qui constituent le facteur déterminant des modes de vie au cours du XXème siècle, mais bien le phénomène technicien ». Un nouveau livre, signé Frédéric Rognon, professeur de philosophie des religions à la faculté de Théologie protestante de Strasbourg, présente et confronte les pensées foisonnantes de Jacques Ellul et Bernard Charbonneau, pour que, « au bord du gouffre, face à l’abîme, un fil de lumière perce les ténèbres de l’avenir. » Eclairant.